Les mammifères

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Les mammifères

Il est difficile pour certains mammifères de les classer en animaux liés à l’eau ou non. En effet tous ont besoin de boire et se rapprochent des points d’eau pour se désaltérer. Certains se baignent également journellement. Tout le monde connait le besoin du bain journalier des éléphants ! D’autre part on observe dans la plupart des cours d’eau des hardes d’antilopes, des buffles et autres ruminants qui passent la journée dans le lit mineur du fleuve. Sans oublier les petits rongeurs, suidés et autres carnassiers que les points d’eau permanents attirent, surtout en saison sèche. Mais tous ces animaux peuvent rester à des dizaines de kilomètres de tout point d’eau, se déplaçant au fur et à mesure de leurs besoins.

On différenciera donc les espèces strictement inféodées au milieu aquatiques et qui passent la quasi-totalité de leur existence dans l’eau, de celles qui sont sédentairement lié au milieu aquatique et qui ne s’en éloigne guère même, si hormis la boisson, ils n’en sont pas obligatoirement dépendants.

Tableau I. Liste des mammifères, strictement inféodés ou simplement liés aux milieux aquatiques, recensés en Afrique au nord de l’équateur. Les couleurs correspondent à celles utilisées par l'UICN. Elles correspondent au degré de vulnérabilité des espèces (voir "statut UICN" dans la colonne de droite).

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1. Les espèces aquatiques

Seules dix espèces appartenant à quatre familles peuvent être considérées comme strictement aquatiques en Afrique.

1.1. Mustelidae

Quatre espèces de loutres, dont trois endémiques en Afrique, sont susceptibles d’être rencontrées en Afrique au nord de l’équateur.

1.1.1. Loutre à cou tacheté

Les loutres à cou tacheté, Hydrictis maculicollis (figure 1),  vivent des biotopes d’eau douce, riches en poissons de petites et moyennes taille, pourvu que l’eau ne soit ni trop boueuse ni polluée. Bien qu’elles soient plus abondantes dans les grands lacs d’Afrique centrale et orientale, on les retrouve aussi dans les ruisseaux, les rivières et les barrages jusqu'à une altitude de 2 500 m. Elles ont une préférence pour les rivières et les lacs où existent de longues herbes, des roseaux, ou des buissons denses. Elles préfèrent les biotopes où existent de gros rochers essentiels à leur abri lors des périodes d’inactivité et d’hibernation. Contrairement aux loutres à joues blanches (voir plus bas) elles ne fréquentent jamais les biotopes marins ou estuariens.

Présente dans de nombreux pays d'Afrique, cette loutre est sans doute éteinte dans des états comme le Burundi, le Ghana, le Lesotho et le Togo.

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Figure 1. Loutre à cou tacheté, Hydrictis maculicollis, sortant juste de l’eau. La fourrure est habituellement rougeâtre à brun chocolat. Il existe quelques taches crème ou blanches sur la poitrine et la gorge qui donne le nom à l’espèce (© derekkeats).

 

1.1.2. Loutre à joues blanches

Les loutres de joues blanches, Aonyx capensis, (figure 2), sont essentiellement aquatiques et rarement trouvé loin de l’eau. L’eau douce est leur l’habitat principal et on ne les rencontre en zone marine que lorsqu’elles n’ont pas accès à l’eau douce. Et dans ce cas elles privilégient les côtes rocheuses. On peut également les trouve dans d’autres habitats diversifiés tels les barrages, les rivières temporaires, les estuaires, les mangroves voire même dans certaines rivières situées en zone désertique. En Éthiopie, on les a trouvées jusqu'à 3 000 m d’altitude. En zone urbaine, les loutres à joues blanches ont été trouvées dans des rivières fortement polluées ou eutrophisées.

Les loutres à joues blanches chassent à des profondeurs variant de 0,5 à 1,5 m, mais elles attrapent leurs plus gros poissons à des profondeurs de 1,5 à 2,5 m.

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Figure 2. Les loutres à joues blanches, Aonyx capensis, ne se limitent pas aux eaux douces. Elles aiment aussi fréquenter les côtes marines rocheuses (© I. Forbes).

 

1.1.3. Loutre à joues blanches du Congo

Les loutres joues blanches du Congo, Aonyx congicus vivent dans les forêts tropicales et les zones marécageuse situées le long du Congo, de ses affluents ou d’autres rivières comme la Sanaga (figure 3). Leur répartition est beaucoup moins étendue que celle des deux autres espèces.

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Figure 3. Répartition géographique des loutres à joues blanches du genre Aonyx (source : UICN red list).

 

1.1.4. Loutre d'Europe

La loutre d’Europe, Lutra lutra (figure 4) a une des distributions la plus étendue de tous les mammifères paléarctique puisque son aire de répartition couvre une partie des trois continents : Europe, Asie et Afrique.

En Afrique, on ne trouve cette espèce qu’au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Elle colonise une importante variété d’habitats aquatiques, lacs, rivières, ruisseaux, marais, forêts marécageuses et même les zones côtières. La présence des loutres est toujours corrélée avec la présence de végétation le long des rives quels que soient les écosystèmes. Pour se reproduire, les loutres ont besoin de trous dans la rive, de cavités entre les racines des arbres, des amas de roche, de bois ou de débris.

Comme la plupart des espèces de loutres, le poisson constitue la base de son alimentation, parfois plus de 80 %. En plus du poisson toute une gamme d’autres proies servent à son alimentation dans des proportions variables : insectes aquatiques, reptiles, amphibiens, oiseaux, petits mammifères et crustacés.

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Figure 4. En Afrique la loutre d’Europe, Lutra lutra, ne se rencontre que dans trois pays du Maghreb, Maroc, Algérie et Tunisie (© Drew Avery).

1.2. Tenrecidae

Les tenrecidés sont de petits mammifères insectivores, la plupart endémiques de Madagascar. Cependant, quelques espèces vivent en Afrique continentale et certaines sont strictement aquatiques comme les potamogales au sens large. Au nord de l’équateur, on est susceptible de rencontrer trois espèces dont le régime alimentaire est proche de celui des loutres, les proies étant toutefois généralement plus petites notamment pour les micropotamogales.

1.2.1. Potamogale géant

Le potamogale géant, Potamogale velox (figure 5), se trouve essentiellement en zone forestière ou en périphérie depuis le Nigeria (rivière Cross) jusqu’en Tanzanie à l’est et en Angola au sud-ouest en au nord de la Zambie au sud-est. On la trouve du niveau de la mer jusqu'à 1 800 m d’altitude.

Il s’agit d’une espèce aquatique qui vit le long des petits ruisseaux forestiers à courant plutôt lent et des torrents de montagne. L’espèce creuse son terrier dont l’entrée se trouve au-dessous du niveau de l’eau. Il lui sert à la fois de refuge et de nid dans les rives des cours d’eau qu’elle fréquente. Il s’abrite dans son terrier durant la journée et devient plus actif dans l’après-midi. En fait, il s’agit d’une espèce nocturne qui possède plusieurs épisodes d’activité chaque nuit et qui se repose pendant la journée. Lorsqu’il est perturbé, il s’échappe dans l’eau. Normalement on ne la trouve jamais dans les grands cours d’eau, mais quelques exceptions semblent néanmoins exister. Le potamogale géant est un nageur habile qui se nourrit de crabes, de poissons, de crevettes et d’insectes aquatiques, plus rarement d’amphibiens. En captivité, il consomme 15 à 20 crabes par nuit. Sa queue très musclée lui permet une nage efficace par des ondulations horizontales comme chez les poissons et les crocodiles. Cette méthode de natation est unique parmi les mammifères aquatiques qui nagent généralement par des ondulations dans un plan vertical, comme les pinnipèdes ou les cétacés. Les membres antérieurs ne sont pas utilisés pour la propulsion et lorsqu’il se déplace sur terre, c’est plutôt assez maladroitement.

Ses déjections servent probablement à marquer les limites de son territoire. Cette espèce se reproduit aussi bien durant la saison sèche que durant la saison des pluies.

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Figure 5. Potamogale géant, Potamogale velox. À gauche : spécimen naturalisé et conservé au Natural History Museum, London (galerie des mammifères) (© John Cummings) ; à droite : dessin publié dans la revue « Transactions of the Zoological Society of London » (© Zoological Society of London).

 

Les deux espèces de micropotamogales sont chacune endémiques dans des régions montagneuses. L’une se situe à l’est, la chaîne du Ruwenzori, l’autre est à l’ouest, le Mont-Nimba.

 

1.2.2. Micropotamogale du Ruwenzori ou potamogale du Ruwenzori

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Figure 6. Le micropotamogale du Ruwenzori, Micropotamogale ruwenzorii, possède des doigts palmés qui lui facilite la nage (© Helmut Diller).

 

Le micropotamogale du Ruwenzori, Micropotamogale ruwenzorii (figure 6), est une espèce assez rare dont on connaît mal les mœurs L’espèce est endémique dans la région du Ruwenzori (RDC et Ouganda), bien que récemment, il ait été signalé dans le Parc National forestier de Nyungwe au Rwanda.

On trouve cette espèce dans les ruisseaux et les petites rivières dans la zone de forêt tropicale de 800 à 900 m et dans la forêt de montagne jusqu'à 2 200 m. On l’a également trouvé dans les ruisseaux de la forêt galerie en zone de savane (herbe à éléphant) de 1 000 à 1 200 m. Elle creuse des terriers qu’elle tapisses de foin ou herbe. L’espèce recherche sa nourriture dans l’eau. Elle s’alimente d’insectes, de larves d’insectes, de vers, de crabes, de petits poissons et de petites grenouilles.

L’espèce nage en pédalant aussi bien avec les pattes de devant qu’avec celles de derrière, un peu comme le fait l’ours polaire. C’est uniquement en plongée qu’elle utilise les pattes de derrière de façon synchrone. La queue ne semble ne pas être utilisée pour la propulsion. L’espèce présente plusieurs périodes d’activité durant la nuit.

 

1.2.3. Micropotamogale du Mont-Nimba

Le micropotamogale du Mont-Nimba, Micropotamogale lamottei (figure 7), est endémique du Mont-Nimba (Guinée et Côte d’Ivoire) et de la montagne Putu Range au Liberia situées près de 400 km plus au sud.

On la rencontre dans les zones de collines boisées, non loin des cours d'eau douce riches en crustacés. Elle fréquente aussi les plantations de cacao ou de café, lorsque la végétation est dense au bord des cours d'eau. Elle est plus rare dans les rizières.

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Figure 7. Le micropotamogale du Mont-Nimba, Micropotamogale lamottei, ne possède pas de doigts palmés comme son cousin du Ruwenzori (© Ed Stauffacher).

 

Parmi les Potamogalinés, cette espèce est la moins adaptée de vie semi-aquatique car elle n'a pas les doigts palmés du micropotamogale du Ruwenzori et n’a pas la queue aplatie latéralement du potamogale géant.

Ce micropotamogale est néanmoins un bon nageur et plongeur, même si ses pattes et sa queue ne semblent pas spécialement adaptées à la nage. Néanmoins, L’espèce se meut dans l'eau en s'aidant de ses pattes et des mouvements latéraux de sa queue. Les spécimens du Mont Nimba peuvent rester en moyenne 10 min dans l'eau pour échapper au danger.

Leurs fortes vibrisses et leur lèvre supérieure servent à localiser et à capturer les proies sous l'eau. Avant de plonger, un observateur a rapporté que le micropotamogale du Mont-Nimba tend la tête au-dessus de l'eau, les moustaches en contact avec sa surface afin probablement de détecter les vibrations de proies potentielles.

Leur régime alimentaire est principalement à base de crabes à carapace molle et de poissons-chats, accompagnés de quelques insectes et têtards. Ce micropotamogale rapporte ses proies une fois capturées sur la berge et dévore les crabes en commençant par l'arrière afin de se préserver des pinces de ces crustacés. En captivité la consommation d'un individu représente 40 g de poisson par jour. Les observateurs pensent que c'est un animal plutôt solitaire et territorial.

 

1.3. Hippopotamidae

Au sein de cette famille, plusieurs espèces ont disparu mais il en existe toujours deux vivantes endémique de l’Afrique : l'espèce la plus connue, l'hippopotame amphibie ou hippopotame commun, Hippopotamus amphibius, et l'hippopotame nain, Choeropsis liberiensis. Leur espérance de vie est d'environ une quarantaine d'années.

1.3.1. Hippopotame commun

La vedette parmi les mammifères est sans conteste l’hippopotame (le cheval du fleuve), Hippopotamus amphibius (figure 8). Son poids est compris entre 2 et 3 tonnes, mais peut atteindre 4 tonnes chez quelques mâles exceptionnels. Ses mœurs sont semi aquatiques, mais durant les chaudes journées il passe la majeure partie de son temps dans l’eau. En effet, à cause de sa masse importante et du fait qu'il ne dispose pas de glande permettant la transpiration, il est très vulnérable à la chaleur. Il peut fermer ses naseaux et rester complètement immergé jusqu'à quinze minutes. Il ne sort de l’eau que la nuit pour aller pâturer aux alentours. Les hippopotames ont la curieuse habitude de disperser leurs excréments avec leur queue qui tourne comme une hélice, attirant de nombreux poissons. Ce sont des herbivores stricts mais qui peuvent devenir très agressifs en deux occasions : les femelles accompagnées de leur petit et les mâles en période de rut (voir encadré « Les pêcheurs ont la parole »). Ils comptent alors parmi les animaux les plus dangereux pour l'homme et de nombreux accidents sont arrivés à ceux qui les approchent alors de trop près. Leurs incisives peuvent mesurer 60 cm de long et comme leur mâchoire peut s'ouvrir à 150°, leurs morsures sont redoutables.

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Figure 8. Hippopotame, Hippopotamus amphibius, sorti de l’eau pour brouter (© IRD/D. Paugy).


Les pêcheurs ont la parole

Monologue de Samba Mamadou Ba d’un village du Département de Matam

(source : Poissons et pêches du fleuve Sénégal, Adrian Adams-Sow, 1996)

 

Certains disent que l’hippopotame ressemble au cheval. Mais en fait, il ne ressemble pas au cheval. Si l’hippopotame ressemble à un autre animal, c’est le phacochère. Ils ont la même courte taille et le même museau, mais l’hippopotame est plus large et plus gros.

Pendant la saison des pluies, l’hippopotame peut devenir dangereux ; il s’agit alors d’une femelle qui a des petits. Quand elle voit une pirogue, elle l’attaque. Elle vient sous la pirogue, puis la soulève brusquement ; elle a une force énorme. Après l’avoir soulevée, elle la lance en l’air, puis la brise avec ses pattes quand elle retombe. Une fois qu’elle a brisé la pirogue, elle happe les passagers et les tue. Elle ne les mange pas, hein ! mais elle les tue.

 

Les hippopotames vivent presque toujours en eau peu profonde, rarement en eau profonde. Les bébés hippopotames naissent sous l'eau et pèsent entre 25 et 50 kg. Ils doivent ensuite monter à la surface pour leur première respiration. Les jeunes restent souvent sur le dos de leurs mères quand l'eau est trop profonde pour eux et s'immergent pour téter. Les hippopotames adultes font habituellement surface pour respirer toutes les 3–5 minutes. Les jeunes doivent respirer toutes les 2–3 minutes.

On trouve cette espèce un peu partout dans les grandes rivières de l’Afrique subsaharienne. Présent autrefois tout le long du Nil, jusque le long du bras de Damiette, il est désormais éteint en Égypte.


Comment les États-Unis ont failli importer des hippopotames en Louisiane

 

Au début des années 1910, les États-Unis sont au bord de la crise. La population ne cesse de croître, il n'y a plus de nouvelles terres à exploiter, les bisons ont été décimés et si rien n'est fait, une pénurie de viande sans précédent frappera le pays. Mais un petit groupe d'hommes a une solution, une idée audacieuse. Leur plan : importer des hippopotames, les faire paître dans les bayous de la Louisiane, et convaincre les Américains de les manger. Ce sont deux hommes qui promeuvent cette idée : Frederick Russell Burnham, un aventurier qui s'est battu dans les guerres apaches et les conflits coloniaux d'Afrique (guerre des Boers notamment), et Fritz Joubert Duquesne, un autre baroudeur qui a la haine des anglais qui finira à la tête d'un réseau d’espions nazis. Burnham parvient à convaincre Robert Broussard, un sénateur de Louisiane, de proposer un « Hippo Act » au Congrès américain : les États-Unis manquent de viande, son cheptel diminue, « Pourquoi ne pas transformer l’Amérique en une nation de mangeurs d’hippos ? ». La viande a apparemment bon goût, surtout les parties grasses de la poitrine. Il suffit d’importer les hippopotames d’Afrique, de les installer dans les marais qui longent la côte du golfe du Mexique, et de les élever pour leur viande. Cette idée audacieuse fut approuvée par l'ancien président Theodore Roosevelt, grand chasseur de trophées africains devant l'Eternel, et le New York Times.

L’idée est estimée pleine de bon sens et grandiose pour le congressiste louisianais. Elle lui permet, entre autres, de résoudre le problème des jacinthes d’eau qui détériorent l’environnement des ruisseaux et des rivières de son état. En se nourrissant ces plantes, les hippopotames importés vont « transformer le fléau qui frappe le sud du pays en de la chair saine et savoureuse pour notre peuple. ».

Pour mener à terme le projet, Burnham et Duquesne vont fonder ensemble une société de lobbying: la « New Food Society ». Le Washington Post n’hésite pas à écrire: « Ce n’est qu’une question d’années avant que d’importantes cargaisons d’hippopotames soient expédiées en Amérique. ».

Il n’y a toujours pas de troupeaux d’hippopotames en Louisiane et « L’idée n’a jamais été vraiment rejetée, mais semble, avec le temps, être tombée dans une sorte d’oubli teinté d’indifférence. ». Le congressiste Broussard se désormais fait calculateur, se livre à de sombres contorsions politiques, repoussant, session après session, le dépôt de son projet de loi au Congrès. Las! les « congressmen » ne se laissent pas séduire par ce projet hippopotamesque.

Un livre intitulé « L'Hippo d'Amérique. Un reportage » (titre original : American Hippopotamus), écrit par le journaliste américain Jon Mooalem, relate cet épisode méconnu où en définitive l'élevage intensif du bœuf dans des parcs d'engraissement et donc la civilisation du "burger" avaient gagné.

L’avertissement de l’éditeur de ce livre conclut néanmoins « Cela étant dit, cette histoire porte sur une idée qui semblait ridicule et qui ne s’est pas réalisée. Cette idée était ridicule. Mais elle était aussi totalement raisonnable. »

 

1.3.2. Hippopotame nain

L’hippopotame nain, Choeropsis liberiensis (figure 9), est une espèce originaire des forêts et des marécages de l'Afrique de l'Ouest. La grande majorité des spécimens sauvages vit au Libéria avec quelques populations plus petites, souvent regroupées près de la frontière libérienne, en Côte d'Ivoire, en Guinée et en Sierra Leone. Bien que le nombre d'hippopotames nains n'ait probablement pas été sensiblement réduit ces dernières années, les populations sont maintenant fragmentées car elles vivent exclusivement dans les portions de cours d'eau qui traversent des régions boisées Ce mammifère est un animal discret, solitaire et nocturne même si la masse d'un mâle adulte peut avoisiner 275 kg.

L'hippopotame nain a conservé de nombreuses adaptations terrestres en comparaison de l'autre espèce d'hippopotame, mais comme lui, c'est un animal semi-aquatique qui se repose au bord de l'eau pour garder sa peau hydratée et une température basse de son corps. L'accouplement et la mise bas peuvent se produire dans l'eau ou sur terre. Mais, aucune étude du comportement lors de la période de reproduction n'a été effectuée dans la nature. De ce fait, les conditions artificielles de vie en captivité peuvent laisser supposer que le comportement animal des jardins zoologiques est différent de celui qui existe dans des conditions naturelles.

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Figure 9. L’hippopotame nain, Choeropsis liberiensis, est plus petit, moins grégaire et moins agressif que son grand cousin l’hippopotame amphibie (© Chuckupd).

Alors que les hippopotames communs sont grégaires, les hippopotames nains vivent seuls ou en très petits groupes, généralement un couple ou une mère et son petit. Les hippopotames nains ont tendance à s'ignorer plutôt qu'à s'affronter en cas de rencontre, ce qui les différencie de leurs cousins très agressifs.

Comme l'hippopotame commun, l'hippopotame nain sort de l'eau à la tombée de la nuit pour se nourrir. Il circule sur des sentiers préexistants pour voyager dans la forêt dense et passe environ six heures par jour à la recherche de nourriture. L'essentiel de leur régime alimentaire se compose de fougères, de grandes feuilles de dicotylédones et de fruits tombés sur le sol.

Introduit dans les jardins zoologiques au début du 20e siècle, il s'est bien reproduit en captivité et la grande majorité des connaissances sur l'espèce proviennent de spécimens de zoo. La survie de l'espèce en captivité est plus assurée que dans la nature et l’UICN estime qu'il reste moins de 3 000 hippopotames nains sauvages. Ils sont menacés principalement par la perte de leur habitat, les forêts étant déboisées et converties en terres agricoles. Ils sont également menacés par le braconnage, la chasse, les prédateurs naturels et la guerre.

Une sous-espèce d'hippopotame nain a vécu au Nigéria au moins jusqu'au 20ème siècle. L'hippopotame nain nigérian, C. liberiensis heslopi, n'a jamais été étudié dans la nature et n'a jamais été capturé. L'hippopotame nain nigérian vivait dans le delta du fleuve Niger, en particulier près de Port Harcourt. Cette sous-espèce est désormais considérée comme éteinte. Les deux sous-espèces étaient séparées par plus de 1800 kilomètres comprenant une zone semi-désertique, le Dahomey Gap, qui isole en deux la zone côtière de forêt dense d'Afrique de l'Ouest.

 

1.4. Siréniens

1.4.1 Lamantin

Les lamantins sont, comme les dugongs (voir plus bas § 1.4.2), des espèces strictement marines qui appartiennent à l’ordre des Sirenia (siréniens). Il existe, selon les auteurs, trois ou quatre espèces de lamantins, mais une seule, le lamantin d'Afrique, Trichechus senegalensis (figure 10), habite la côte occidentale de l'Afrique et le réseau hydrographique de toute l'Afrique de l'Ouest jusqu'au Tchad (figure 11).

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Figure 10. Lamantin, Trichechus senegalensis, en captivité se nourrissant de végétation immergée (© S. Shankar).

 

Le lamantin est espèce strictement amphibie totalement adaptée au milieu aquatique et qui n’en sort plus. Trichechus senegalensis, également appelé vache de mer ou veau marin, est un gros mammifère amphibie qui peut mesurer jusqu’à 5 m de long et peser une tonne. Il a l’aspect général d’un phoque. Il se déplace sous l'eau à l'aide de sa puissante nageoire caudale, ses deux membres antérieurs lui servant de gouvernail.

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Figure 11. Distribution des trois ou quatre (selon les auteurs) espèces  de lamantins. On remarquera qu’il n’existe aucun chevauchement dans la répartition de chacune d’elles.

Les lamantins sont exclusivement herbivores, non ruminants, et consomment des plantes flottantes ou immergées. Les plantules de palétuviers, Rhizophora, de jacinthes d'eau, Eichhornia crassipes, du bourgou, Echinochloa pyramidalis, ou des graminées constituent l’essentiel de ses repas. Un lamantin peut manger jusqu'à 50 kg de végétaux par jour. Bien qu'il soit diurne, il ne semble se nourrir que la nuit. Les plantes qu'il consomme contiennent souvent de la silice qui provoque l'abrasion des dents. Ce phénomène est compensé par leur renouvellement permanent.

La femelle commence généralement à se reproduire vers l'âge de 7 ans. Au terme d'une gestation d'environ 13 mois, elle donne naissance à un petit d'environ 30 kg. Une femelle lamantin peut nourrir deux petits à la fois. C'est cependant un phénomène exceptionnel, car ces siréniens ont rarement deux petits à la fois, mais il arrive qu'un orphelin soit adopté par une nourrice qui n'est pas sa mère.

Cette espèce rare et menacée est aujourd'hui protégée dans le monde entier. Bien qu'il n'ait aucun prédateur, l'expansion humaine a réduit son habitat et beaucoup d'animaux sont blessés par les hélices des hors-bords. L'ingestion accidentelle de déchets de plastiques et autres accessoires de pêche peut aussi le tue. Ils ne sont pas carnivores, mais consommant une grande quantité d'aliments végétaux, il peut « bioconcentrer » certains polluants. Les lamantins d’Afrique figurent depuis 1986 sur la liste des espèces vulnérables.

Différentes légendes et croyances font référence aux lamantins. Le fait que la femelle lamantin possède des glandes mammaires est certainement à l’origine de ces croyances (voir encadrés : Les lamantins et l’homme, Paroles de pêcheurs).


Les lamantins et l'homme

 

Les lamantins sont liés aux légendes concernant les sirènes. Ainsi, le chant des sirènes est assimilé à celui des lamantins qui serait, en effet, comparé à une lamentation. De plus, lorsque la femelle lamantin allaite, ses glandes mammaires, situées sous les bras et non sous le ventre comme la plupart des mammifères, s'hypertrophient, ce qui a pu faire fantasmer les marins sur des seins des sirènes.

Même si on n’en connaît pas l’origine exacte, cette légende est ancienne dans l’antiquité Ulysse est déjà confronté à ces déesse de la mer. La forme de la queue des sirènes serait, quant à elle, plutôt due à celle des dugongs, cousins des océans Pacifique et Indien des lamantins.

C’est en référence à ces légendes que l’on a donné le non de siréniens à l’ordre qui regroupe les lamantins et les dugongs.


Les pêcheurs ont la parole

Discussion entre Mamadou Bakary Sakho, Demba Traoré et Samba Mamadou Ba des villages des Département de Bakel et de Matam

(source : Poissons et pêches du fleuve Sénégal, Adrian Adams-Sow, 1996)

 

Mamadou Bakary Sakho : Il y a des lamantins dans le fleuve. Quand le fleuve est plein à ras bord, même de la berge on les voit jouer et donner des coups de queue dans l'eau. Ils sont très gros; on dirait des pirogues au milieu du fleuve.

C'est un poisson qu'on appelle lamantin, liwonge. Mais c'est un poisson qui a des mamelles. Quand il pleure, ses larmes coulent.

L'autre année, la crue en a amené un dans le kolangal (ndlr : cuvette de décrue) de Diawara. Un pêcheur de Bakel, Seydou Kawanté, est venu le prendre en voiture; il y tenait à peine. Ils l'ont mis dans la fosse d'eau profonde près de Bakel; mais quand l'eau est devenue chaude, il est mort.

Demba Traoré : Le lamantin peut porter malheur. C'est pourquoi, si un Somono de Manael prend un lamantin, il en enverra une part à un Somono de Yélingara, de Diawara, de Moudéri, de Galladé, de Bakel, de Kounghani… Ceux parmi eux qui en connaissent le secret, viendront le voir pour conjurer le mauvais sort.

Quand on prend un lamantin, on l'égorge. Mais on ne l'égorge pas comme un mouton; on lui tranche la nuque. Et après lui avoir tranché la nuque, il faut lui trouer la gorge comme un chameau. Tu prends un petit bâton, et après lui avoir tranché la nuque, tu plonges le bâton plusieurs fois dans la plaie, jusqu'à ce qu'il meure. Ce n'est pas assez de lui trancher la nuque.

Les vrais tueurs de lamantin, avant de le tuer vont couper des branches d'un certain arbre; ils l'en frappent, puis les éparpillent sur lui. Sans cela, comme je l'ai déjà dit, on n'échappe pas au mauvais sort. Quand on le dépouille, la peau et les entrailles ne sont pas ramenées en ville ; on les noie dans le fleuve. Sa peau séchée est comme un bâton de l'arbre qu'on appelle sanbe (ndlr : Grewia bicolor, arbuste utilisé en médecine traditionnelle).

Les Soninkés disent que si tu tues un lamantin et tu le mets dans ta pirogue, ses larmes rempliront d'eau ta pirogue. C'est une vieille histoire, mais ce n'est pas une vieille vérité. Ce ne sont pas ses larmes qui remplissent la pirogue.

Une seule personne ne peut pas tuer un lamantin, le soulever et le mettre dans une pirogue, parce qu'un lamantin peut être très gros. Une fois que des chasseurs ont tué et dépouillé un lamantin, ils le font rouler dans l'eau, puis ils enfoncent une pirogue dans l'eau sous lui. Ils écopent ensuite l'eau de la pirogue jusqu'à ce qu'elle revienne à la surface. Voilà pourquoi il y a de l'eau dans la pirogue; ce ne sont pas des larmes, c'est à cause de cette manière de faire.

Samba Mamadou Ba : Si un lamantin est pris dans un filet, il le déchire. Mais quand on tue un lamantin avec un harpon, avant de le faire monter à terre on éloigne les jeunes, et même des adultes.

Vous savez, la femelle du lamantin ressemble beaucoup à une femme humaine. Or si un homme voit une femme nue, son sexe se dresse. C'est pourquoi, s'il nous arrive de tuer un lamantin femelle, nous éloignons les jeunes. Car si on ne les éloigne pas, et que leur sexe se dresse à la vue du lamantin, ils ne deviendront jamais des hommes. Le lamantin peut faire cela aux gens. C'est pourquoi, si nous tuons un lamantin, nous le tuons seuls et ne voulons pas être observés.

Si nous tuons un lamantin, nous le mangeons; mais avant de le manger, nous prononçons des formules pour conjurer le mauvais sort.

1.4.2 Dugong

Il n’existe qu’une seule espèce de dugong, Dugong dugon. Ce mammifère est essentiellement marin, néanmoins, il tolère les eaux saumâtres des zones côtières, et on en trouve fréquemment dans les canaux des mangroves où les herbiers sont fréquents. C’est pour cette raison que nous le mentionnons ici. Il est proche des lamantins et vit, en Afrique, sur les littoraux de l’océan indien, y compris la mer Rouge. En Afrique, encore plus que les lamantins les populations de dugongs sont menacées et le long des côtes, de l’Égypte à l’Afrique du Sud, les populations sont très restreintes et leur survie paraît incertaine (UICN).

C’est un gros mammifère qui peut mesurer 3 à 4 mètres et atteindre près de 500 kg.

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Figure 12. Dugong, Dugong dugon, broutant le fond à la recherche des plantes aquatiques qui constituent son unique alimentation, Marsa Alam, Égypte (© Julien Willem).

 

2. Les herbivores non aquatiques

Au nord du Sahara, sept familles de mammifères peuvent être considérées comme dépendantes de l’eau sans y être strictement inféodées. Parmi celles-ci, on dénombre la plupart des antilopes

2.1. Bovidae (Tragelaphinae)

Deux espèces du genre Tragelaphus appartiennent à ce groupe. Le nom de « Tragelaphus » semble avoir deux origines. Tragelaphos (du grec ancien tragélaphos « bouc-cerf » ; tragus « bouc ») et élaphe « cerf ». Aussi connu sous le nom d’un cheval-cerf. Pourrait également signifier antilope à corne en spirale car toutes les espèces de ce genre ont de telles cornes. Dans cette famille, seuls les mâles sont pourvus de cornes.

2.1.1. Guib harnaché

Les guibs harnachés, Tragelaphus scriptus (figure 13), se rencontrent en Afrique subsaharienne, partout où il existe une couverture végétale pour se cacher. On les trouve depuis le niveau de la mer jusqu’à 3 000 m en Afrique orientale et vivent aussi bien dans les forêts que dans les savanes. Ils recherchent les lieux humides et ombragés et se rencontrent seulement aux abords des cours d’eau ou de points d’eau permanents. Ils sont naturellement absents des régions arides et semi-arides et de vastes étendues de forêt à couvert fermé. Le guib harnaché vit solitaire ou en couple, plus rarement en petits groupes familiaux.

guib harnache

Figure 13. Le guib harnaché, Tragelaphus scriptus, vit dans presque toute l'Afrique au sud du Sahara. Il est uniquement absent dans les régions trop sèches (© IRD/D. Paugy).

2.1.2. Sitatunga ou guib d'eau

Le sitatunga, Tragelaphus spekii (figure 14), est la plus aquatique des antilopes. Elle a la faculté de se nourrir en étant partiellement voire complètement immergée dans l'eau. Le guib d'eau est un excellent nageur et plongeur et se plaît, au repos, à demeurer dans l’eau, la tête émergeant seule.. Cette espèce est proche du guib harnaché, Tragelaphus scriptus, qui vit à proximité des eaux mais en est moins dépendant. On le trouve dans toute l’Afrique subsaharienne, amis semble éteint au Togo et au Niger. Il vit dans les grandes forêts tropicales africaines, les zones marécageuses et humides, les îlots, les marais de papyrus et de roseaux. Sa morphologie est bien adaptée aux zones marécageuses car il possède des sabots longs et largement écartés.

sitatunga

Figure 14. Le sitatunga, Tragelaphus spekii, ici un mâle, est un animal des marais forestiers ou non. Nocturne, il généralement vit en couple (© Ivanhoe).

2.2. Bovidae (Reduncinae)

La sous-famille des Reduncinae regroupe des espèces de taille moyenne à grande ayant, pour la plupart, des liens étroits avec de l’eau. Il existe trois genres en Afrique subsaharienne, dont deux existent au nord de l’équateur. Dans notre zone d’étude, toutes les espèces ont des poils longs t comme chez de nombreuses antilopes, seuls les mâles portent des cornes dont l’extrémité se courbe vers l’avant et sont annelées à la base.

2.2.1. Redunca ou cobe des roseaux

Le redunca, Redunca redunca (figure 15), est une antilope de taille moyenne (65 kg pour les mâles, 45 pour les femelles) qui fréquente généralement les plaines inondables et des habitats boisés, avec une préférence pour les zones de hautes herbes près de d’écosystèmes aquatiques permanents. On rencontre cette espèce depuis le Sénégal jusqu’à l’Éthiopie, mais on estime qu’il est désormais éteint en Côte d’Ivoire et en Ouganda.

redunca

Figure 15. Le redunca, Redunca redunca, n’aime pas vivre en grands troupeaux et préfère les associations de quelques individus, d’une dizaine au maximum (© David Castor).

2.2.2. Grand redunca

Le grand redunca, Redunca arundinum (figure 16), est plus gros que son cousin le redunca puisque les mâles peuvent peser près de 100 kg (85 pour les femelles). Les mâles on des cormes assez longues pouvant mesurer jusqu’à 45 cm. On trouve essentiellement cette espèce dans l’hémisphère sud, mais il existe quelques populations au bord du lac Victoria.

2.2.2. Grand redunca

Le grand redunca, Redunca arundinum (figure 16), est plus gros que son cousin le redunca puisque les mâles peuvent peser près de 100 kg (85 pour les femelles). Les mâles on des cormes assez longues pouvant mesurer jusqu’à 45 cm. On trouve essentiellement cette espèce dans l’hémisphère sud, mais il existe quelques populations au bord du lac Victoria.

grand redunca

Figure 16. Les grands reduncas, Redunca arundinum, sont des animaux solitaires qui vivent au plus en couple (© Jack Versloot).

2.2.3. Cobe à croissant

Le cobe à croissant ou cobe onctueux ou cobe defassa, Kobus ellipsiprymnus (figure 17), est une grande antilope, certain mâles pouvant atteindre près de 250 kg et 1m30 au garrot. Sa dénomination cobe à croissant est due au cercle blanc caractéristique sur la croupe, entourant la queue. Le mâle porte deux cornes arrondies en forme de lyre et ornées de bourrelets en spirale. Les femelles et les jeunes vivent en troupeaux de 20 à 40 individus, parfois davantage, gardés par un seul mâle âgé qui défend farouchement son territoire.

L’espèce fréquente les broussailles, la savane ou les zones forestières à proximité des rivières ou des mares permanentes dont il ne s’éloigne jamais. On la rencontre un peu partout dans la région subsaharienne. Comme nom suggère (son nom anglais est « waterbuck »), le cobe à croissant est un bon nageur et s’enfuit dans l’eau s’il est poursuivi, bien qu’il semble qu’il n’aime pas particulièrement entrer dans l’eau.

cobe defassa

Figure 17. Le cobe à croissant, Kobus ellipsiprymnus, est le plus gros cobe connu. Il est commun dans toute la zone subsaharienne (© IRD/D. Paugy).

2.2.4. Lechwe du Nil

Le lechwe du Nil ou lechwe de Mme Gray, Kobus megaceros (figure 18), est une antilope de taille moyenne dont les sabots sont parfaitement adaptés aux terrains marécageux, ce qui fait de lui une antilope semi-aquatique/semi-terrestre, comme le sitatunga. En effet, ses sabots particuliers, longs et écartés, lui permettent de ne pas s'enfoncer dans les sols boueux, mais également de nager encore mieux que les autres antilopes. C’est une espèce sociale, qui vit en en troupes de 50 à quelques centaines voire même de milliers d’individus.

Il vit dans les marais, les prairies sèches ou inondées et on le trouve souvent dans des eaux peu profondes, 10 à 40 cm d’eau en général. On le rencontre au sud du Soudan, marais de la région du Nil blanc (Bahr-el-Gebel, Bahr-al-Gazal, Bahr-el-Chabal, Sobat, Pibor, etc) et au sud-ouest de l'Éthiopie le long des rivières Baro et Gela.

Cette espèce était classée Vulnérable par l’UICN depuis 1994, car il ne restait plus qu’environ 30 000 individus sauvages. Mais comme les populations continuent de diminuer, cette espèce est classée En danger depuis 2008.

2.2.4. Lechwe du Nil

Le lechwe du Nil ou lechwe de Mme Gray, Kobus megaceros (figure 18), est une antilope de taille moyenne dont les sabots sont parfaitement adaptés aux terrains marécageux, ce qui fait de lui une antilope semi-aquatique/semi-terrestre, comme le sitatunga. En effet, ses sabots particuliers, longs et écartés, lui permettent de ne pas s'enfoncer dans les sols boueux, mais également de nager encore mieux que les autres antilopes. C’est une espèce sociale, qui vit en en troupes de 50 à quelques centaines voire même de milliers d’individus.

Il vit dans les marais, les prairies sèches ou inondées et on le trouve souvent dans des eaux peu profondes, 10 à 40 cm d’eau en général. On le rencontre au sud du Soudan, marais de la région du Nil blanc (Bahr-el-Gebel, Bahr-al-Gazal, Bahr-el-Chabal, Sobat, Pibor, etc) et au sud-ouest de l'Éthiopie le long des rivières Baro et Gela.

Cette espèce était classée Vulnérable par l’UICN depuis 1994, car il ne restait plus qu’environ 30 000 individus sauvages. Mais comme les populations continuent de diminuer, cette espèce est classée En danger depuis 2008.

lechwe nil

Figure 18. Dans les troupeaux mixtes, les mâles de lechwe du Nil, Kobus megaceros, ont une hiérarchie de dominance basée sur la coloration qui fonce avec l’âge (© Hatem Moushir).

Les lechwes du Nil subissent des mouvements saisonniers courts (30-40 km) de suivre l’ascension et la chute des eaux de crue.. Les hommes qui n’ont pas les pleine maturités marques blanches sont généralement tolérés, mais deux étroitement assortie des mâles matures seront battront vigoureusement - souvent qui s’entrechoquent leurs cornes avec têtes sous l’eau. Les mâles dominants vont uriner grâce à leurs pattes avant sur leur crinière et peuvent puis frottez-le sur les femmes.

2.3. Tragulidae

2.3.1. Chevrotain aquatique

Le chevrotain aquatique ou biche-cochon, Hyemoschus aquaticus (figure 19), est une petite antilope (environ 35 cm de hauteur au garrot pour un poids maximal de 15 kg) au poil acajou semé de taches blanches sur la région dorsale du corps et marqué de bandes blanches longitudinales plus ou moins nettes sur les flancs. Chaque mâchoire est garnie de canines et celles de la mâchoire supérieure sont très développées chez le mâle. Bien que sa nourriture soit essentiellement à base de graines, de fruits, de feuillages, etc, il est dit aussi piscivore et même nécrophage. Il nage très aisément.

S’il se sent en danger, le chevrotain aquatique s’immobilise, mais si la menace persiste il se réfugie dans l’eau, où il peut plonger sous la surface et rester cacher presque complètement immergé.

Il fréquente les vallées des rivières situées dans les forêts denses équatoriales le long de la ceinture occidentale et centrale de l’Afrique.

chevrotain aquatique

Figure 19. Le chevrotain aquatique, Hyemoschus aquaticus, est endémique dans les régions tropicales de l’Afrique. Alors qu’il vit principalement dans les régions côtières, l’espèce se trouve de la Sierra Leone jusqu’à l’ouest de l’Ouganda. Il occupe uniquement les zones proches des ruisseaux ou des rivières, jamais à plus de 250 m de l’eau. (© Goldfuss, Georg August; Schreber, Johann Christian Daniel; Wagner, Andreas Johann).

 

3. Les carnivores non aquatiques

3.1. Viverridae

Genette aquatique

La genette aquatique, Genetta piscivora (figure 20), se trouve dans les forêts équatoriales d'Afrique centrale, au nord et à l’est de la RDC, sur les rives des rivières du bassin du Congo. Elle se nourrit essentiellement du poisson et de crustacés qu'elle pêche dans les torrents auprès desquels elle vit. Ce viverridé diffère des autres genettes par sa morphologie spécialisée à la vie aquatique, par son pelage et les couleurs de ce dernier.

Bien qu’elle soit chassée, cette espèce reste « tabou » pour les pygmées, exceptés les hommes adultes. On ne donc comprend pas bien pourquoi elle est menacée d’autant que son habitat ne semble pas se restreindre.

genette aquatique

Figure 20. La genette aquatique, Genetta piscivora, est considérée comme parmi les plus rares des carnivores africains, et n’est connu que par une trentaine spécimens de musée (© Amy Roosenberg).

 

3.2. Herpestidae

Mangouste des marais

La mangouste des marais, Atilax paludinosus (figure 21), est une grande mangouste qui peut peser un peu plus de 5 kg. On trouve cette espèce dans toute l’Afrique subsaharienne, avec une préférence pour les habitats d’eau douce permanents entourée d’une végétation dense, comme les marais, roselières et estuaires. La mangouste des marais est un membre important de la communauté d’animaux vivant dans les marais de papyrus, où l’eau désoxygénée limite la vie aquatique à divers poissons à respiration aérienne, grenouilles, larves d’insectes, escargots et mammifères.

La mangouste des marais est un omnivore vorace qui consomme toutes sortes de viande ainsi qu’une grande variété de fruits. Cette mangouste nage fréquemment le long des berges et passe au crible tous les trous et crevasses sous-marins à la recherche d’animaux aquatiques à manger. Pour se nourrir de crabes et d’escargots, elle les jette contre les rochers afin de briser les carapaces et les coquilles.

La mangouste des marais est solitaire et est généralement plus active durant la nuit, et le crépuscule. C’est un excellent nageur, mais contrairement aux loutres, elle préfère conserver la tête hors de l’eau. Lorsqu’elle est acculée, cette mangouste émet, par ses glandes anales, des flux de liquide brun d’odeur fétide.

mangouste marais

Figure 21. Dans certaines régions d’Afrique, la mangouste des marais, Atilax paludinosus, est gardée comme animal de compagnie (© Derek Keats)

 

3.3. Felidae

Chat des marais

Le chat des marais, Felis chaus (figure 22), se rencontre dans le Caucase, en Asie centrale, en Inde et en Asie du sud-est. En Afrique, il ne vit qu’en Égypte. Il vit toujours près de l'eau et généralement sous couvert végétal dense. Toutefois, il existe également en milieu désertique, mais alors on le trouve le long des lits des rivières ou dans les oasis. Cette espèce peut vivre en groupe familiaux, avec le mâle, la femelle et des jeunes. Les mâles ont un comportement très protecteur vis-à-vis des jeunes, encore plus que les femelles. Le dimorphisme sexuel pourrait être lié à ce comportement.

Chat des marais

Le chat des marais, Felis chaus (figure 22), se rencontre dans le Caucase, en Asie centrale, en Inde et en Asie du sud-est. En Afrique, il ne vit qu’en Égypte. Il vit toujours près de l'eau et généralement sous couvert végétal dense. Toutefois, il existe également en milieu désertique, mais alors on le trouve le long des lits des rivières ou dans les oasis. Cette espèce peut vivre en groupe familiaux, avec le mâle, la femelle et des jeunes. Les mâles ont un comportement très protecteur vis-à-vis des jeunes, encore plus que les femelles. Le dimorphisme sexuel pourrait être lié à ce comportement.

chat marais

Figure 22. Le chat des marais, Felis chaus, peut peser jusqu’à 15 kg. Essentiellement diurne, il ne chasse que le jour (© Davidvraju).

C'est un excellent nageur, capable de se mettre à l'eau pour attraper des poissons ou pour échapper à un danger. Il chasse aussi des rongeurs, y compris des ragondins (6 à 7 kg), des lièvres, oiseaux, reptiles, amphibiens, voire des jeunes d'autres mammifères.

 

4. Les primates non aquatiques

Cercopithecidae

Cercopithèque de De Brazza

Le cercopithèque de De Brazza, Cercopithecus neglectus (figure 23), est aussi connu localement sous le nom de singe des marais car on le trouve souvent dans les zones humides en Afrique équatoriale. C’est un singe essentiellement arboricole et social qui vit en petites troupes de 5 à 30 individus.

cercopitheque brazza

Figure 23. Le cercopithèque de De Brazza, Cercopithecus neglectus, est un singe de taille moyenne qui aime vivre près de l’eau et qui nage volontiers (© Steve Wilson).

Qu’elle vive en plaine, dans les forêts tropicales humides de basse altitude ou les forêts marécageuses, cette espèce se trouve toujours à proximité d’un cours d’eau.

 

5. Les rongeurs non aquatiques

Thryonomyidae

Il existe un genre Thryonomys et deux espèces assez proches qui se distinguent essentiellement par la taille :

  • l’un de grande taille (longueur 50 à 60 cm et presque 9 kg), le grand aulacode ou grand rat des roseaux, Thryonomys swinderianus (figure 24), possède une queue de longueur au moins double à celle du pied postérieur ;
  • l’autre plus petit (40 cm et un peu plus de 7 kg), le petit aulacode ou petit rat des roseaux, Thryonomys gregorianus, avec juste un tronçon de queue.

Les deux espèces ont l’aspect d’un gros rat avec un pelage roux jaunâtre très rêche, particulièrement fourni et développé sur le dos. Les membres postérieurs sont beaucoup plus longs que les antérieurs. Ils creusent des terriers au voisinage des cours d’eau et se nourrissent de végétaux divers. Ils peuvent causer d’importants dégâts dans les plantations riveraines. Ils vivent, en Afrique subsaharienne, près de tous les cours d’eau et zones marécageuses. Ils sont essentiellement nocturnes et vivent groupes de quelques individus dirigés par un seul mâle adulte.

La chair de ces animaux est délicate et très appréciée (voir encadré Agouti dans sauce Gouagouassou).

grand aulacode

Figure 24. Le grand aulacode, Thryonomys swinderianus, quitte souvent son habitat traditionnel pour aller se nourrir dans les plantations de canne à sucre, de maïs ou de manioc (© rbairdpccam).


Agouti dans sauce Gouagouassou (sauce d’origine Baoulé, ethnie ivoirienne)

En Afrique de l’Ouest, l’aulacode est appelé, à tort, agouti.

 

Ingrédients

1kg viande d’agouti fumée

1kg petit aubergine amer

1kg de gombo bien frais

1 petite poignet d’akpi

5 piments

2 boules de tomate fraiche

2 oignons

sel

bouillon

1 cuillère à soupe d’huile

1 cuillère à soupe de concentré de tomate

1/2 litre d’eau

 

Préparation

Préparation : 30 minutes

Cuisson : 1h30

 

Description

Faire bouillir les petites aubergines amères appelées gnangnan en Baoulé pendant 30 mn.

Les faire égoutter et ensuite les écraser sur le caillou à écraser (si vous le voulez très amère, sinon rincez deux fois avec abondamment d’eau et remettre encore à ébullition pendant 15mn).

Mettre une marmite sur le feu avec l’huile et la moitié d’un oignon coupé en dé, faire revenir puis ajouter la pâte de tomate, laisser bien prendre et ajouter 1/2 litre d’eau, puis la viande d’agouti, les tomates, l’oignon entier, le gombo, piments, préalablement nettoyé.

Laisser cuire pendant 30mn et retirer les tomates, l’oignon les gombos. Les écraser puis les ajouter avec la purée d’aubergine dans la sauce.

Dans une poêle faire griller les Akpis puis les écraser avec l’autre moitié d’oignon et ajouter à la sauce, puis l’assaisonner (sel+bouillon), le laisser cuire et servir avec du foutou de banane ou d’igname.

 

6. Les espèces introduites

Deux espèces de mammifères fréquentant les milieux aquatiques ont été introduites en Afrique.

 

6.1. Buffle domestique

Le buffle domestique ou buffle d'eau ou buffle d'Inde, Bubalus bubalis (figure 25), originaire de l’Asie tropicale, a été introduit en Tunisie dans la réserve d’Ichkeul où il fait désormais partie de la faune locale.

Au début des années 2000, une étude prospective (Francia et al., 2000) propose d’élever ce bovin qui pourrait être une alternative intéressante pour produire un lait de qualité afin de l’exporter vers l’Italie, grand producteur de mozzarella, le produit final. L’élevage du buffle pour la production laitière pourrait également donner aux éleveurs un revenu supérieur à l’élevage de la vache laitière parce qu’il valorise mieux les aliments riches en fibres. Selon cette étude, la filière lait de bufflonne et l’appui à l’Italie pourrait permettre aux éleveurs tunisiens d’entrer dans le marché européen. Jusqu’à ce jour, il semble cette activité possible n’est restée qu’à l’état de projet.

buffle domestique

Figure 25. Comme son nom l’indique, le buffle domestique ou buffle d'eau, Bubalus bubalis, adore se prélasser dans les mares ou les rivières. Contrairement à son cousin africain, le buffle caffre, Syncerus caffer, qui n’a jamais pu être domestiqué, le buffle d’Asie est utilisé aussi bien pour les travaux de trait que pour la production de lait (© Carlos Ginard).

 

6.2. Ragondin

Le ragondin ou coypou, Myocastor coypus (figure 26), originaire d’Amérique du Sud, a été introduit dans différents pays d’Afrique de l’est ou d’Afrique australe. Actuellement, il n’existe aucune preuve de l’existence de populations sauvages de ragondin en Afrique australe ou en Tanzanie. Au Kenya, cette espèce a été importée en 1950 pour sa fourrure. En 1965, des ragondins se sont échappé et ont colonisé le lac Naivasha. Des pythons de Séba (Python sebae) ont été introduits pour contrôler les populations de rongeurs. Le résultat a été décevant et le déclin final puis la disparition de ces nuisibles s’est produite en 1984 pour des raisons inconnues. Cependant quelques preuves photographiques confirment que quelques individus existent encore actuellement au Kenya, à l’est de la vallée du Rift (figure 27).

ragondin

Figure 26. Originaire d’Amérique du Sud, le ragondin, Myocastor coypus, a été introduit dans de nombreux pays où il est élevé pour l’exploitation de sa fourrure. C’est après s’être échappé des structures d’élevage qu’il a colonisé le milieu naturel où il est devenu une peste en raison des dégâts multiples qu’il cause (© Gzen92).

myocastor afrique

Figure 27. Introduit dans quelques pays d’Afrique pour sa fourrure, quelques spécimens de ragondin, Myocastor coypus, se sont échappés. Mais il ne semble que l’espèce ne se soit acclimatée qu’en certains endroits du Kenya (source : Nutria in Africa).

Le ragondin influence et transforme considérablement son habitat, et est classé parmi les nuisibles dans la plupart des pays.

Il est accusé en particulier de :

  • Dégradation et mise à nu des berges favorisant leur érosion progressive ;
  • fragilisation des fondations d’ouvrages hydrauliques par le réseau de galeries ;
  • dégâts causés aux cultures (céréales, maraîchage, écorçage des arbres…) ;
  • menace sur certaines espèces végétales (surtout aquatiques) à cause d’une surconsommation ;
  • destruction des nids d'oiseaux aquatiques ;
  • possibilité de transmission de maladies telles que la douve du foie ou la leptospirose.

Selon une étude publiée dans l'Ecological Society of America, le ragondin a été classé en tête des 10 espèces exotiques les plus nuisibles d'Europe. À ce titre, les ragondins sont également officiellement répertoriés par le projet européen Daisie (Delivering Alien Invasive Species Inventories for Europe) parmi les 922 espèces les plus envahissantes.