Les oiseaux
Les oiseaux Il est souvent difficile de dire si une espèce d’oiseau est aquatique ou non certaines espèces ne sont liées à la présence d’eau que pour une partie de leur activité. Tous les oiseaux ont certes besoin d’eau, au moins pour s’abreuver, mais beaucoup profitent aussi des milieux et des ressources qu’offrent les marais, sans être strictement liés aux zones humides. Les oiseaux représentent le groupe de vertébrés le plus varié et le plus visible dans les eaux continentales. Ils utilisent les milieux aquatiques pour se nourrir ou pour se reposer. |
Il nous appartient donc de définir les relations unissant l’espèce et son milieu et mettre en évidence les facteurs des zones aquatiques qui sont indispensables à telle ou telle espèce. Un premier critère à étudier est l’origine du régime alimentaire. Ainsi, un oiseau appartiendra vraiment l’avifaune aquatique s’il se nourrit essentiellement de poissons, de plantes ou d‘insectes aquatiques. Cependant, plusieurs espèces d’oiseaux, comme le vanneau éperonné (Vanellus spinosus) par exemple, vivent seulement au bord de l’eau, mis se nourrissent surtout d’insectes terrestres. De ce fait, de telles espèces ne participent donc pas à la vie écologique du système aquatique. À l’inverse, de nombreuses espèces d’oiseaux terrestres viennent, à l’occasion exploiter les éclosions d’insectes aquatiques.
L’ensemble du peuplement en oiseaux aquatiques présente néanmoins une certaine unité :
- ce sont des espèces se déplaçant souvent facilement ce qui explique leur vaste répartition ;
- une forte proportion des espèces est migratrice ;
- enfin, ces espèces ne présentent guère de phénomènes d’isolement géographique.
Nous ne retenons donc ici que les espèces dont la répartition suit de près celle des marais et des fleuves mais n’avons pas pris en compte des oiseaux comme les Guêpiers qui creusent leur nid dans les berges des fleuves ou comme certains Tisserins qui affectionnent les roselières et encore d’autres.
A grands traits, les oiseaux aquatiques peuvent être divisés en trois grands groupes : les nageurs (canards, pélicans…), les marcheurs (souvent assimilés aux échassiers mais qui comprennent également les poules d’eau, les râles…) et ceux qui se perchent (martins-pêcheurs, rapaces…).
1. Les grèbes (Podicipédidés)
Ces oiseaux ont le corps en forme de fuseau. Les pattes, situées très en arrière, sont très courtes, ce qui constitue une adaptation à la vie aquatique. C'est cette position des pattes par rapport au corps qui leur a valu le nom de Podicipédidés (pieds au derrière). Ce sont des oiseaux archaïques aux pates lobées (non pas palmés mais aussi efficaces que les palmures des canards), au plumage épais. Ils ne quittent pas l'eau et préfèrent plonger plutôt que de fuir en vol.
Complètement adaptés à la vie sur et sous l'eau, les grèbes ne sont pas adaptés à la marche sur terre, où ils vont très rarement car ils y sont très vulnérables. Ce ne sont pas non plus des spécialistes du vol, car leurs ailes sont relativement petites et leur musculature pectorale est assez peu développée.
Le plumage des grèbes, très épais, fut autrefois utilisé pour réaliser des manchons ou border des pelisses. Ce plumage leur assure une bonne isolation vis-à-vis de l'eau. Dans la zone d’étude le grèbe castagneux ou petit grèbe (Tachybaptus ruficollis) est assez fréquent dans les lacs permanents (figure 1). C’est un petit oiseau aquatique de 21 à 29 cm et d’une envergure de 40 à 45 cm, pour un poids variant de 100 à 275 g (en moyenne 200 g). À part cette espèce, il est néanmoins possible de rencontrer quatre autres espèces, mais elles sont rares ou occasionnelles (figure 2).
Figure 1. Le grèbe castagneux ou petit grèbe (Tachybaptus ruficollis) aime bien les eaux dormantes, aussi n'est-il pas rare de le trouver sur les petits étangs, les mares et même les fossés inondés. De tous les grèbes, il est en effet celui qui peut nicher sur les pièces d'eau dont la surface est la plus réduite. Et ceci, non pas en raison de sa petite taille mais de son régime alimentaire moins piscivore que les autres espèces de grèbes (© Andreas Trepte).
Figure 2. Hormis le grèbe castagneux, il est possible de rencontrer quatre autres espèces de grèbes en Afrique au nord de l'équateur. Toutefois, la présence de ces espèces est très occasionnelle.
2. Les pélicans (Pélécanidés)
Les pélicans sont des oiseaux grégaires dont le long bec est muni d’une poche souple d’une capacité de plus de 10 litres où ils peuvent stocker jusqu'à 4 kg de poisson. Ces gros oiseaux font preuve de très grandes qualités en vol et ce sont notamment d’excellents planeurs.
Les pélicans se nourrissent exclusivement de poissons et font preuve d'un appétit vorace puisque leur consommation quotidienne varie entre 1 kg et 1,5 kg. Ces adeptes de la pêche collective ont technique de pêche assez originale. De nombreux pélicans nagent côte à côte et se rapprochent de la rive, en refoulant les poissons qu'ils capturent avec la poche de leur bec.
Les pélicans fréquentent surtout les eaux douces (grands lacs, larges cours d'eau), mais il n’est pas rare de les rencontrer également dans les estuaires et les lacs salés.
Au nord de l’équateur, deux espèces sont assez fréquantes : le pélican blanc (Pelecanus onocrolatus) (figure 3) et le pélican brun (Pelecanus rufescens) qui est plus petit (figure 4).
Figure 3. Pélican blanc, Pelecanus onocrolatus (© IRD/D. Paugy).
Figure 4. Pélican brun Pelecanus rufescens (© Ron Knight).
Occasionnellement on peut également rencontrer le pélican frisé (Pelecanus crispus) (figure 5) en Afrique du nord, mais cette espèce menacée vit habituellement dans les Balkans et en Asie.
Figure 5. Pélican frisé, Pelecanus crispus, (© Karelj).
3. Les cormorans (Phalacrocoracidés)
Les cormorans sont des oiseaux aquatiques, généralement de taille moyenne, au corps allongé, au long cou et au bec puissant et crochu. Les cormorans arborent généralement un plumage noir et un long cou flexible. Selon les espèces, ils pèsent de 1,5 à 3,5 kilogrammes.
Le plumage du cormoran est partiellement perméable, du fait que les trois quarts de la surface de ses plumes (constituée par la partie la plus externe) ne comportent pas de crochets sur les barbules, rendant celles-ci libres et perméables. Cette propriété lui permet de dépenser moins d'énergie pour plonger, car il emmagasine moins d'air dans son plumage que chez les autres oiseaux aquatiques.
En contrepartie, ils passent un certain temps à se sécher au soleil puisque leur plumage se mouille. La position du cormoran, ailes déployées à la sortie de l’eau lui permet entre autres de sécher ses plumes. Il s’avère que ce comportement permet également au cormoran une meilleure thermorégulation et facilite sa digestion.
En surface, il nage avec le corps très enfoncé, de sorte qu’on ne voit dépasser que son cou. Très à l'aise sous l'eau, il peut nager en apnée pendant plus de deux minutes, mais en général, il n'excède pas des plongeons d'une trentaine de secondes. Il se déplace sous l'eau avec vélocité afin de capturer ses proies. Ce sont des pêcheurs habiles qui se nourrissent exclusivement de poissons, ou presque car il leur arrive de consommer des amphibiens, des insectes aquatiques ou des crustacés.
Que ce soit en mer ou dans les eaux intérieures, les cormorans fréquentent les étendues d'eau libre.
En Afrique, au nord de l’équateur, on est susceptible de rencontrer six espèces (trois autres sont limitées à l’Afrique australe). Parmi ces six espèces trois sont très répandues et trois sont plus localisées.
Les espèces à large répartition sont le cormoran africain (Microcarbo africanus) (figure 6), le grand cormoran (Phalacrocorax carbo) (figure 7) et le cormoran à poitrine blanche (Phalacrocorax lucidus) (figure 8).
Figure 6. Le cormoran africain (Microcarbo africanus), moins sociable que les autres espèces de cormoran, est généralement seul ou en petit groupe, mais il peut y avoir des rassemblements comptant jusqu'à une trentaine d'individus sur certains lieux de pêche riches en poissons. Pour passer la nuit, il se perche sur un arbre qu'il partage volontiers avec d'autres cormorans, voire d'autres espèces d'oiseaux (© DickDaniels).
Figure 7. Le grand cormoran, Phalacrocorax carbo est un oiseau sociable. Il se nourrit généralement en solitaire, mais peut former des groupes sur les zones particulièrement poissonneuses. Le grand cormoran plonge sous l'eau depuis la surface pour capturer ses proies, qui vivent généralement sur le fond, même s'il lui arrive de pêcher des poissons vivant en banc. Bien que la plupart de ses proies ne dépasse pas 20 cm, il est capable de capturer des poissons d'un kilogramme et demi. Les individus ont tendance à se percher et à voler en communauté (© IRD/J.-J. Lemasson).
Figure 8. Le Cormoran à poitrine blanche, Phalacrocorax lucidus, était auparavant une sous-espèce du grand cormoran, Phalacrocorax carbo, et certains auteurs le considèrent encore comme tel aujourd’hui. Sa distribution est limitée à l’Afrique subsaharienne (© IRD/D. Paugy).
Trois espèces possèdent une répartition plus localisée et restreinte (figure 9) :
- le cormoran pygmée, Microcarbo pygmeus, occasionnel en Afrique du nord ;
- le cormoran huppé, Phalacrocorax aristotelis, existe essentiellement en Eurasie. Il existe néanmoins une sous-espèce en Afrique du nord essentiellement marine, mais qui colonise parfois les eaux intérieures ;
- le cormoran de Socotra, Phalacrocorax nigrogularis, est surtout présent dans le Golfe Persique. Mais certains individus migrent occasionnellement vers l'ouest jusque sur les côtes de la Mer Rouge Dans notre zone, on le trouve en Éthiopie, en Érythrée et au nord de la Somalie.
Figure 9. Trois espèces de cormorans que l’on peut rencontrer très occasionnellement en Afrique au nord de l’équateur.
4. Les oiseaux-serpents (Anhingidés)
L’oiseau-serpent ou anhinga possède un corps sombre avec des ailes argentées et une longue queue étagée. Il a un long cou qui lui a donné son surnom, un long bec pointu et les pattes palmées.
Lorsqu’il nage, l'anhinga a le corps en-dessous du niveau de l'eau, avec juste la tête et le cou qui dépassent. Cette particularité le fait ressembler à un serpent et contribue aussi à son surnom.
Lorsqu'il recherche sa nourriture, l'anhinga plonge puis rapporte ses proies à la surface. Là, il les jette en l'air, les rattrape avec son bec et les avale la tête la première. Contrairement à la plupart des espèces aquatiques qui ont des glandes susceptibles de produire de l'huile, l'anhinga n'est pas résistant à l'eau. En conséquence, après la pêche, il est obligé de se percher sur une branche au-dessus du courant pour sécher son plumage. On peut donc l'apercevoir, souvent en compagnie de cormorans avec lesquels il cohabite, étaler ses longues ailes pour qu'elles retrouvent leurs qualités et puissent de nouveau conserver la chaleur.
Dans les airs, l'anhinga a une posture très typique et il vole avec la queue légèrement déployée et le cou partiellement tendu vers l'avant. Lorsqu’il a le plumage mouillé, l'anhinga éprouve de grosses difficultés à décoller, il doit frapper vigoureusement les ailes tout en courant sur la surface de l'eau.
Au nord de l’équateur, on est susceptible de rencontrer deux espèces. La plus répandue est l’anhinga d’Afrique, Anhinga rufa, (figure 10) qui peuple les cours d’eau et lacs de toute l’Afrique sub-saharienne. L’anhinga roux, Anhinga melanogaster, est originaire du sud-est du continent asiatique, mais certains spécimens ont été observés en Égypte.
Figure 10. Anhinga d’Afrique, Anhinga rufa, dans le Parc National des Oiseaux du Djoudj (© IRD/J.-J. Lemasson). Première zone humide d'importance au sud du Sahara, le Parc National des Oiseaux du Djoudj (12 000ha) est essentiel pour l'hivernage des migrateurs d'Europe du Nord et d'Afrique de l'Ouest (environ 3 millions d'oiseaux transitent, plus de 400 espèces dénombrées).
5. Les hérons (Ardéidés)
On dénombre près un peu plus de 20 espèces de hérons dans la zone d’étude (tableau I).
Tableau I. Espèces d’Ardéidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
5.1 Les grands hérons
On distingue le héron cendré, Ardea cinerea, le héron pourpré, Ardea purpurea, le héron goliath, Ardea goliath, le héron à tête noire, Ardea melanocephala et la grande aigrette, Ardea alba. Ces oiseaux mesurent entre 100 et 120 cm, ont une envergure de 150 à 200 cm et pèsent entre 1 à 1,5 kg. A noter la morphologie particulière du héron goliath dont les caractéristiques sont respectivement 140 cm, 210-230 cm et 5 kg
Figure 11. Cinq principales espèces de grands hérons du genre Ardea.
5.2 Les petits hérons
Différentes espèces de petits hérons comme les bihoreaux, les blongios, les butors et les crabiers vivent également en solitaires. La taille de ces oiseaux dépasse rarement 50 cm et leur poids n’atteint que quelques centaines de grammes, très rarement 1 kg.
Figure 12. Huit principales espèces de petits hérons appartenant à différents genres.
5.3 Garde-bœufs et aigrettes
On trouve aussi en abondance les hérons garde bœufs, Bubulcus ibis, qui, contrairement aux autres hérons, ne vivent pas forcément lié au milieu aquatique. Même si l'eau et les zones humides continuent à jouer un rôle important dans leur mode de vie, on peut aussi bien les retrouver dans les steppes et les prairies souvent associés au bétail ou aux troupeaux sauvages. Le héron garde bœuf est une espèce vagabonde dont quelques individus ont réussi à traverser l’Atlantique dans les années 1930 et qui a rapidement colonisé l’Amérique du nord et du sud.
Figure 13. Héron garde-bœufs, Bubulcus ibis, Wacha, Niger (© ChriKpo).
Les aigrettes vivent aussi généralement en bandes. On notera la manière de pêcher tout à fait particulière de l’aigrette ardoisée, Egretta ardesiaca. Lorsqu'elle recherche sa pitance, l'aigrette ardoisée déploie complètement ses ailes et forme une sorte de parapluie qui est toujours complètement ouvert même lorsque les efforts pour s'approprier une proie échouent. La vue d'une proie mouvante peut déclencher la formation de ce parapluie qui n'est totalement effective que lorsque l'oiseau a accompli les quelques pas d'ajustement qui lui sont nécessaires pour le positionner juste au-dessus de la victime. Cette étrange stratégie a pour but d'éviter les reflets du soleil dans l'eau. D'après de nombreux spécialistes, l'ombre ainsi créée chasse les petits poissons mais permet de fixer ceux qui ont une grande ou une moyenne taille. L'aigrette se sert ensuite de son bec comme d'un harpon et frappe verticalement sa proie. Le succès de l'opération n'est vraiment assuré que si le poisson est immobile. La réalisation du plan commence par une marche lente dans l'eau, mais son exécution est parfois interrompue si le poisson effectue un mouvement. Le coup n'étant plus jouable, l'oiseau rétracte alors ses ailes.
Figure 14. Aigrettes ardoisées, Egretta ardesiaca, en action de pêche (© Neil Strickland).
Figure 15.Quatre espèces d’aigrettes du genre Egretta.
6. Les Scopidés
Cette famille est voisine de celle des hérons. L'ombrette, Scopus umbrella, est le seul membre de la famille des Scopidés. Elle a une tête triangulaire munie d’une houppette, et des pattes assez courtes. L'ombrette recherche sa nourriture pendant la journée. Elle inspecte les berges et leurs abords sur ses longues pattes, utilisant son excellente vue pour guetter toutes sortes de proies aquatiques. Parfois, elle survole lentement la surface de l'eau avant de fondre sur sa victime. Son menu est constitué principalement de têtards et de grenouilles, mais elle ne dédaigne pas non plus les insectes, les crevettes et les petits poissons.
Figure 16. Ombrette, Scopus umbrella, au bord du lac Victoria, Entebbe, Ouganda (© IRD/C. Lévêque). L'ombrette est une espèce assez commune qui bénéficie d'une assez sulfureuse réputation car de nombreux africains sont persuadés qu'elle porte malheur. Les malgaches croient que ceux qui détruisent un nid d'ombrette peuvent attraper la lèpre. Un poème de cette île l'appelle l'oiseau du diable. Les Bochimans du Kalahari sont persuadés que ceux qui dérobent un nid d'ombrette seront touchés par la foudre. De telles croyances contribuent involontairement à protéger l'espèce.
7. Les cigognes (Ciconiidés)
Les espèces de ce groupe se rencontrent un peu partout en Afrique subsaharienne. Quelques espèces sont caractéristiques telles que le jabiru, Ephippiorhynchus senegalensis, (figure 17) noir et blanc avec la pointe du bec rouge vif ou l’ibis tantale, Mycteria ibis, au bec jaune (figure 18).
Figure 17. Jabiru, Ephippiorhynchus senegalensis, delta de l’Okavango (© PanBK).
Figure 18. Ibis tantale, Mycteria ibis, Kasenyi, lac George, Ouganda (© IRD/D. Paugy.)
Les espèces du genre Ciconia, les vraies cigognes, ne sont pas strictement liées aux milieux aquatiques, mais lorsqu’elles séjournent dans les zones humides elles apprécient de se nourrir d’amphibiens. Quatre espèces, peu fréquentes sont susceptibles d’être rencontrées dans notre zone d’étude (figure 19) : la cigogne noire, C. nigra, la cigogne épiscopale, C. episcopus, la cigogne d’Abdim, C. abdimii, et la cigogne blanche migratrice venue d’Europe, C. ciconia.
Figure 19. Les quatre espèces de cigognes du genre Ciconia, que l’on rencontre en Afrique.
Le bec ouvert, Anastomus lamelligerus, (figure 20) est un oiseau entièrement noir dont le bec, échancré en son milieu, sert à ouvrir les mollusques (gastéropodes, moules) dont il se nourrit principalement.
Figure 20. Bec ouvert, Anastomus lamelligerus, lac Victoria, Entebbe, Ouganda (© Tom Tarrant).
Enfin, le marabout, Leptoptilos crumenifer (figure 21), non strictement lié aux milieux aquatiques, est l’un de plus gros oiseaux africains. Il est fréquent dans les villes où il joue le rôle d’éboueur, et niche dans les arbres. Il se nourrit de charognes et de petits animaux. Il est fréquent sur les lieux de débarquement des poissons.
Figure 21. Marabout, Leptoptilos crumenifer, lac George, Ouganda (© IRD/D. Paugy.)
8. Le bec-en-sabot (Balaenicipitidés)
Le bec-en-sabot, Balaeniceps rex, endémique du continent africain, est une espèce massive dont le nom provient de son bec aussi gros, voire plus gros que la tête (figure 22). Cette espèce monotypique et mythique vit solitaire (en couple au moment de la nidification) dans les grandes roselières d’Afrique de l’Est. On le trouve dans les lacs, grands cours d'eau et marais garnis de papyrus et de roseaux, particulièrement au nord de l'Ouganda (lac Victoria par exemple), à l'ouest de la Tanzanie, au Soudan du sud (au niveau du Nil Blanc) et dans le marais de Bangweulu au Nord-est de la Zambie.
Figure 22. Le bec-en-sabot, Balaeniceps rex, serait-il un oiseau sorti directement de la préhistoire ? De nombreux mythes et légendes entourent cet échassier qui présente des similitudes (physiques, anatomiques, biologiques ou comportementales) à la fois avec les pélicans, les marabouts, les cigognes, les ombrettes ou les hérons (© IRD/D. Paugy).
Le bec-en-sabot est un grand échassier qui peut atteindre 100 à 120 cm de haut. Son envergure peut atteindre 2,30 m. Il pèse de 4 à 7 kg. Il n'y a pas de réel dimorphisme sexuel chez cette espèce ; le mâle est juste un peu plus gros que la femelle et a un bec plus long. De même, il n'y a guère de différence entre le plumage nuptial et le plumage habituel.
Essentiellement piscivore, son régime alimentaire est constitué de poissons-chats, de protoptères, de serpents aquatiques ou de grenouilles. Opportuniste, il ne dédaigne pas compléter avec des varans, tortues, rongeurs, oisillons ou des crocodiles juvéniles.
Il peut sembler, de par son esthétique, sortir directement de la préhistoire. De nombreux mythes et légendes entourent cet échassier.
On ne connaît que peu d'informations sur les mœurs et les origines de cet oiseau difficile à observer dans son milieu naturel. Cette espèce est classée vulnérable par l’UICN. Les principales menaces qui pèsent sur elle sont la destruction de l'habitat, principalement des zones de nourrissage (souvent asséchées pour les transformer en zones agricoles), mais aussi la chasse pratiquée entre autres pour alimenter les zoos.
9. Les Gruidés
Les grues royales, Balearica regulorum (figure 23), sont de magnifiques oiseaux qui fréquentent des habitats ouverts et humides comme les berges de rivières, les prairies inondées temporairement par de l'eau peu profonde, les marécages, ou des milieux plus secs, savanes ouvertes à proximité de l'eau, qui lui permettent de chercher sa nourriture.
Figure 23. Grues royales, Balearica regulorum, cratère du Ngorongoro, Tanzanie (© IRD/C. Lévêque). Elles passent le plus clair de leur temps à rechercher de la nourriture. Elles sont omnivores, se nourrissant de plantes, graines, insectes, grenouilles, vers, serpents, petits poissons et œufs d'espèces aquatiques. La grue royale est le symbole national de l'Ouganda et est présente sur le drapeau et les armoiries de ce pays.
Les grues couronnées, Balearica pavonina (figure 24), ressemblent beaucoup aux grues royales et on les confond parfois. La grue couronnée a une répartition plus septentrionale, mais leur aire de répartition se chevauche à la hauteur de l’équateur (figure 25). Elles vivent en couple au cours de la saison de reproduction et font leur nid sur le sol dans les prairies ou les roseaux. Une fois la nidification terminée, elles se rassemblent en groupe.
Figure 24. Grue couronnée, Balearica pavonina, parc national de Waza, Cameroun (© Ron Knight). Elle vit jusqu'à quarante ans, en couple fidèle. Cette fidélité est telle que l’on raconte, sans certitude, que le survivant se suicide à la mort de son conjoint. Dans la tradition initiatique bambara (Mali), la grue couronnée est à l'origine de la parole et les hommes ont appris à parler en l'imitant. Les Africains pensent que cet oiseau est conscient de ses dons, qu'il a la connaissance de lui-même, et de ce fait il serait à l'origine de la parole de Dieu et de la connaissance que l'homme a de Dieu.
Figure 25 La tête des grues royales, Balearica regulorum et les grues couronnées, Balearica pavonina permet de distinguer aisément les deux espèces. La grue royale possède un sac gulaire rouge vif très développé et a des joues parfaitement blanches. Chez la grue couronnée, le sac gulaire est peu développé, voire presque invisible et les joues, bicolores, ont la moitié supérieure blanche tandis que la moitié inférieure est rosâtre.
Figure 26. Les grues royales, Balearica regulorum vivent plus au sud que les grues couronnées, Balearica pavonina. Toutefois, leurs aires de répartition se superposent au niveau de l’équateur.
La plupart du temps, les grues caronculées, Grus carunculata (figure 27), peuplent marécages assez inaccessibles. Elles fréquentent généralement des marais peu profonds avec beaucoup de végétation, comme le Carex. Bien qu’omnivores, les grues caronculées ont une préférence pour une alimentation d’origine aquatique tels que les tubercules, les rhizomes de Carex submergées et les nénuphars Ce sont les plus herbivores des grues africaines. L’autre portion du régime alimentaire se compose d’insectes aquatiques d’escargots, d’amphibiens voire même de serpents quand l’occasion se présente. Environ 90 % de la nourriture de cette espèce provient d’eaux peu profondes. À l’occasion, elles mangent aussi des graines ou de l’herbe graine, mais beaucoup moins souvent que les autres espèces de grues africaines.
Figure 27. Grues caronculées, Grus carunculata, Maremi National Park, Botswana (© Fiver Löcker). Elles ne se rencontrent qu’au sud du Sahara, hormis une population isolée qui vit sur les hautes terres éthiopiennes.
Les grues cendrées, Grus grus et les grues demoiselles, Grus virgo (figure 28), ont une vaste aire de répartition. Les premières existent depuis l’Amérique du Nord jusqu’à la Sibérie. En Afrique, la limite sud est le Sahara qu’elles ne franchissent pas. On les trouve néanmoins en Égypte, au Soudan, en Éthiopie et au Kenya. Les secondes n’existent pas en Amérique du Nord, mais peuple tout l’Orient. Ces espèces se reproduisent dans les fondrières, les landes de bruyères humides et les marais d'eau douce peu profonds, ainsi que dans les forêts marécageuses. Elles hivernent dans les campagnes ouvertes, près des lacs et des marais, ou plus loin dans les zones cultivées.
Figure 28. Les grues demoiselles, Grus virgo et les grues cendrées, Grus grus, font, toutes deux, l’objet de nombreuses croyances. Pour les Égyptiens, les grues allaient combattre, aux sources du Nil, les pygmées, « sortes de petits hommes », dit Aristote, « montés sur de petits chevaux, et qui habitent des cavernes ». D'après les Grecs, les grues se mettent un caillou dans le bec, lorsqu'elles traversent le mont Taurus, pour s'obliger à rester muettes, et éviter d'éveiller l'attention des aigles. Les grues passent encore pour avoir dévoilé à Palamède plusieurs caractères de l'alphabet. Ce serait, dit-on en examinant les invariables dispositions du vol des grues, que ce judicieux observateur aurait imaginé les lettres V et Y ; d'où le nom d'oiseau de Palamède, donné en Grèce.
10. Les ibis (Treskiornithidés Threskiornithidés)
Les ibis se reconnaissent à leur bec allongé et recourbé. Dans notre zone d’étude, on est susceptible de rencontrer huit espèces. Parmi celles-ci, les plus connus sont l’ibis sacré, Threskiornis aethiopica (figure 29), blanc et noir, qui était momifié par les Egyptiens, l’ibis hagedash, Bostrychia hagedash (figure 30), entièrement noir, l’ibis falcinelle, Plegadis falcinellus (figure 31), de couleur rouille avec de magnifiques reflets métalliques verts et l'ibis olive, Bostrychia olivacea (figure 32), qui a la particularité de posséder une crête proéminente et un bec rouge.
Figure 29. Ibis sacrés, Threskiornis aethiopica, sur le bord du lac Victoria, Speke Gulf, Tanzanie (© IRD/ C. Lévêque).
Figure 30. Ibis hagedash, Bostrychia hagedash, sur le bord du lac Victoria, Speke Gulf, Tanzanie (© IRD/ C. Lévêque).
Figure 31. Ibis falcinelle, Plegadis falcinellus, cratère du Ngorongoro, Tanzanie (©WernerRehm).
Figure 32. Jeune ibis olive, Bostrychia olivacea, au pied du mont Kenya, Kenya (© Merrittimages). Chez ce spécimen immature, le bec n’a pas encore la couleur rouge corail spécifique de l’espèce.
Hormis ces ibis assez communs, il existe quatre autres espèces moins fréquentes dont l’aire de répartition est également plus restreinte (figure 33).
Figure 33. Quatre espèces occasionnelles d’ibis africains. Hormis l’Ibis vermiculé, les autres ont une répartition limitée en Afrique au nord du Sahara.
Au groupe on rattache également deux espèces de spatules. La spatule blanche, Platalea leucorodia (figure 34), est présente en Eurasie et au nord de l’Afrique jusqu’à l’équateur. La spatule africaine, Platalea alba (figure 35), est endémique du continent africain au sud du Sahara, y compris à Madagascar. Les deux espèces sont entièrement blanches et possèdent un bec aplati et arrondi à l’extrémité. Chez la spatule blanche, il existe une huppe blanche finement méchée de jaune absente chez l’autre espèce.
Figure 34. Spatule blanche, Platalea leucorodia, (© Andreas Trepte). On remarquera la belle huppe blanche qui n’existe pas chez sa cousine la spatule africaine, Platalea alba.
Figure 35. Spatule africaine, Platalea alba, Kazinga Channel, Ouganda (©Tom Tarrant). On remarquera les pattes et la face qui sont rouges ce qui n’est pas le cas chez la spatule blanche, Platalea leucorodia.
11. Les flamants (Phoenicoptéridés)
Il existe deux espèces de flamants en Afrique. L’une d’elle, le flamant rose, Phoenicopterus roseus (figure 36), existe aussi bien en Afrique qu’en Eurasie, tandis que le second, le flamant nain, Phoeniconaias minor (figure 37), plus méridional, se rencontre du sud du Sahara jusqu’en Inde.
Figure 36. Flamants roses, Phoenicopterus roseus, Marievale Nature Reserve, Gauteng, Afrique du Sud (© Derek Keats).
Figure 37. Flamants nains, Phoeniconaias minor, lac Nakuru, Kenya (© Francesco Veronesi).
La différence la plus nette entre les deux espèces n’est pas toujours évidente. Ainsi, la différence de taille n’est évidente que si les deux espèces sont côte à côte, d’autant plus que dans chaque espèce il existe aussi une différence de taille entre les sexes. On pourra cependant les différencier grâce à la couleur de leur bec (figure 38) :
Le flamant rose, Phoenicopterus roseus, a le bec rose pâle avec l’extrémité noire.
Le flamant nain, Phoeniconaias minor, a le bec d’un rouge foncé profond et l’extrémité noire, mais il apparaît souvent plutôt noirâtre.
Figure 38. Différence de coloration du bec entre le flamant rose, Phoenicopterus roseus, à gauche (© Marylou Jean) et le flamant nain, Phoeniconaias minor, à droite (© H. Zell).
12. Les anatidés (oies, canards, etc.)
Il existe de nombreuses espèces d’anatidés inféodés aux milieux humides de l’hémisphère nord-africain (tableau II).
Tableau II. Espèces d’anatidés recensées en Afrique au nord de l’équateur
On peut grossièrement diviser les anatidés en deux grands groupes, les canards et les oies.
12.1 Les canards
Nous nous contenterons de ne citer que les espèces les plus fréquentes et les plus caractéristiques dans la zone. Le canard à bosse (Sarkidiornis melanotos) dont le mâle est muni d’une grosse caroncule à la base du bec (figure 39).
Figure 39. Le mâle du canard à bosse, Sarkidiornis melanotos, possède sur le bec une caroncule noire caractéristique de cette espèce de gros canard, Kruger National Park, Afrique du Sud (© Bernard Dupont).
Les dendrocygnes vivent généralement en troupes bruyantes et il n’est pas rare de rencontrer ensemble le dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata, dont la face est blanche et le dendrocygne fauve, D. bicolor, au plumage roux et plus uni (figure 40).
Figure 40. Dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata, à gauche (© Christiaan Kooyman), et dendrocygne fauve, Dendrocygna bicolor, à droite (© Benutzer:Else2).
Les canards de surface comprennent 13 espèces du genre Anas dont certaines sont des migrateurs européens (figure 41), et quelques espèces des genres Nettapus et Tadorna (figure 42). Les tadornes sont certainement les plus gros canards que l’on puisse rencontrer dans la zone. Toutes ces espèces prennent leur nourriture en barbotant à la surface de l’eau.
Figure 41. Les treize espèces de canards du genre Anas que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Figure 42. Hormis le genre Anas, il existe d’autres canards de surface appartenant aux genres Nettapus et Tadorna.
Les canards plongeurs des genres Aythya, Netta, Oxyura et Thalassomis (figure 43) vont chercher les herbes aquatiques et les mollusques au fond de l’eau.
Figure 43. Huit espèces de canards plongeurs que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
12.2 Les oies
On est susceptible de rencontrer quatre espèces dont trois habitent l’Afrique sub-saharienne. L’ouette d’Égypte, Alopochen aegyptiacus, au plumage partiellement beige contrastant avec son dessus plus foncé (figure 44) et l’oie armée de Gambie, Plectopterus gambensis, noire et blanche avec un gros bec rouge (figure 45) sont fréquentes du sud du Sahara jusqu’à l’Afrique du Sud. L’ouette à ailes bleues ou bernache à ailes bleues, Cyanochen cyanoptera (figure 46), est originaire d’Ethiopie où elle fréquente les plateaux humides en altitude. Enfin l’oie cendrée, Anser anser (figure 47), est surtout présente en Amérique du Nord et en Eurasie. Toutefois, il existe quelques populations en Afrique du Nord, notamment Au Maroc, en Algérie et en Tunisie.
Toutes ces oies sont des herbivores qui pâturent à terre.
Figure 44. Ouette d’Égypte, Alopochen aegyptiacus, Sunset Dam, Lower Sabie, Kruger National Park (© Bernard Dupont).
Figure 45. Oie armée de Gambie, Plectopterus gambensis, Ngorongoro Conservation Area, Tanzania (© Bob).
Figure 46. Ouette à ailes bleues, Cyanochen cyanoptera, animal en captivité (© Brent Moore).
Figure 47. Oie cendrée, Anser anser, Maroc (© Lucyin).
13. Jacanidés
Dans notre zone d’étude, on rencontre deux espèce de jacana, le jacana nain, Microparra capensis, et le jacana à poitrine dorée ou jacana d’afrique, Actophilornis africanus. Il existe à Madagascar une troisième espèce endémique de l’île, le jacana malgache, Actophilornis albinucha.
Les jacanas possèdent des doigts très allongés qui leur permettent de marcher sur les nénuphars et les herbiers flottants. Le jacana à poitrine dorée, espèce la plus commune, possède un plumage roux vif (figure 48). Plus rare, le jacana nain possède un plumage beaucoup plus clair tirant sur le beige (figure 49).
Figure 48. Jacana à poitrine dorée, Actophilornis africanus, lac Baringo, Kenya (© Francesco Veronesi)
Figure 49. Jacana nain, Microparra capensis, rivière Kafue, Zambie (© Hans Hillewaert).
14. Rallidés
Les rallidés sont des oiseaux de taille petite à moyenne (de 12 à 63 cm), terrestres et aquatiques. Leur cou est modérément long. Ils ont les ailes larges, la queue courte et de fortes pattes. Ils fréquentent une grande variété de zones humides, mais on peut également les rencontrer dans des régions herbeuses, des forêts et des broussailles denses. En général la plupart des rallidés sont des généralistes omnivores qui se nourrissent d’invertébrés, de fruits et de graines.
Tantôt se faufilant dans les roseaux, comme le râle à bec jaune, Amaurornis flavirostra, tantôt nageant à découvert comme les poules d’eau (deux espèces du genre Gallinula), les rallidés sont des oiseaux assez variables d’allure. Leur plumage lâche leur donne une silhouette ronde en général et leurs doigts sont assez longs, fins ou (comme chez les foulques du genre Fulica) festonnés. Les poules sultanes ou talèves (trois espèces du genre Porphyrio) se reconnaissent aux reflets bleu et vert brillants de leur plumage et à leur bec et leurs pattes rouge vif.
Dans notre zone d’étude on est susceptible de rencontrer 19 espèces (tableau III).
Tableau III. Espèces de rallidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Les râles, au sens large, appartiennent six genres différents (figure 50). La plupart vivent dans les marais et rivières peu profondes cachés dans la végétation aquatique. Seuls les deux espèces du genre Crex ne sont à proprement parler aquatiques car ils préfèrent fréquenter les près ou les pâturages situés aux abords des zones humides plutôt que les marais ou les rivières.
Figure 50. Six des huit espèces de râles que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Les marouettes ressemblent beaucoup aux râles, mais sont plus petites. Leur anatomie crâniale est également légèrement différente. Toutes les marouettes appartiennent au genre Porzana (figure 51).
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Figure 51. Les trois espèces de marouettes que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Les talèves qui appartiennent tous au genre Porphyrio présentent un plumage avec des reflets violets, bleus ou verts ce qui les distingue des autres rallidés dont la coloration est plus neutre puisque les couleurs dominantes sont l bruns, le châtain, le noir ou le gris. On notera également la couleur rouge vif de la large plaque frontale qui surmonte le bec massif de ces espèces (figure 52).
Figure 52. Les trois espèces de talèves que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Contrairement aux autres rallidés qui marchent à découvert ou se faufilent dans la végétation, les foulques et les gallinules passent en général la majorité de la journée à nager.
La foulque est facilement reconnaissable à son écusson frontal et son bec blancs très visibles. Cet écusson est rouge ou orangé chez les gallinules de la zone d’étude (figure 53).
Les foulques et les gallinules sont d'excellentes nageuses même si elles n’ont pas les pieds palmés comme les anatidés. Au contraire, tous les deux n'aiment guère à voler. C'est à la nage et par immersion que la fuite s'opère en priorité.
Ces espèces ont un régime essentiellement végétarien complété par des insectes, des petits mollusques, des têtards, voire même des petits poissons.
Figure 53. Les quatre espèces de foulques et de poules-d’eau que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
15. Les rapaces (Accipitridés et Pandionidés)
15.1 Accipitridés
Celui qui est le plus inféodé aux milieux humides est sans aucun doute le pygargue vocifère ou aigle pêcheur, Haliaeetus vocifer, au plumage marron et blanc (figure 54). Le Pygargue vocifère est principalement piscivore. Les poissons qu'il capture pèsent entre 190 grammes et 3 kilos. Plus généralement, la moyenne des proies se situe entre 400 g et 1 kg. En dehors de cela, les aigles pêcheurs d'Afrique consomment également des rongeurs et des oiseaux d'eau tels que les cigognes, les ibis, les spatules, les foulques, les canards et plus particulièrement les flamands. Ils sont également connus pour consommer des charognes.
Figure 54. Pygargue vocifère ou aigle pêcheur, Haliaeetus vocifer, canal Kazinga, Queen Elizabeth National Park, Ouganda (© IRD/D. Paugy).
En Afrique du Nord, on trouve également le pygargue à queue blanche, Haliaeetus albicilla (figure 55) qui prélève surtout du gibier d’eau : oies, foulques, canards, etc.
Figure 55. Pygargue à queue blanche, Haliaeetus albicilla (© Surub).
Dans l’Afrique sub-saharienne, le palmiste africain, Gypohierax angolensis (figure 56), fréquente les cours d’eau et les mangroves où poussent les palmiers dont les fruits sont sa principale source d’approvisionnement. Lorsque les palmiers sont absents ou rares, il s’attaque aux charognes échouées ou flottant sur l’eau. Il lui arrive également de capturer des petits poissons en surface, des crabes ou des grenouilles.
Figure 56. Palmiste africain, Gypohierax angolensis, Makasutu, Gambia (© Steve Garvie).
15.2 Pandionidés
Le balbuzard pêcheur, Pandion haliaetus, blanc et gris cendré est le seul représentant africain dans cette famille (figure 57). Le balbuzard se nourrit uniquement de poissons capturés à la surface de l'eau : ils pèsent généralement entre 150 et 350 grammes, mais ils peuvent atteindre exceptionnellement jusqu'à 1 kg. Cet oiseau possède une technique de pêche inégalée. Il repère sa cible en la survolant d'une hauteur de 10 à 20 mètres ou en pratiquant le vol stationnaire. Il plonge alors, tête la première, ailes repliées et serres en avant, immerge uniquement les pattes et ressort avec sa proie qu'il transporte jusqu'à son nid ou sur un perchoir où il la dévore. Des serres incurvées et des petites aspérités entre les doigts permettent au balbuzard d'agripper et de maintenir les poissons les plus glissants. Sur le chemin du perchoir.
Figure 57. Balbuzard pêcheur, Pandion haliaetus (© Greg Tee).
16. Les Héliornithidés
Si cette famille comprend trois espèce, une seule d’entre elles existent en Afrique sub-saharienne, le grébifoulque d’Afrique, Podica senegalensis (figure 58). Il s’agit d’une espèce au long cou évoquant un peu la silhouette de l’anhinga. Son bec est assez long et rouge vif. On le rencontre aussi bien dans les rivières que dans les lacs pourvu qu’il existe un important couvert végétal alentours. IL capture ses proies sous l’eau, qu’il s’agisse d’adultes ou de larves d’invertébrés aquatiques, de crustacés, d’amphibien, de mollusques ou de poissons.
Figure 58. Grébifoulque d’Afrique, Podica senegalensis, Lac Mburu, Ouganda (© Francesco Veronesi).
17. Les œdicnèmes (Burhinidés)
Dans la zone d’étude on est susceptible de rencontrer quatre espèces de ces petits oiseaux échassiers (tableau IV).
Tableau IV. Espèces d’œdicnèmes recensées en Afrique au nord de l’équateur
Bien qu’ils soient classés comme limicoles les préférences de ces oiseaux vont aux habitats secs, caillouteux et ouverts. Les quatre espèces qui ressemblent beaucoup ont un plumage vermiculé de brun et de grands yeux jaunes (figure 59).
Figure 59. Les quatre espèces d’œdicnèmes que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
18. Les petits échassiers
18.1 Les Charadriidés
Ces sont des oiseaux limicoles de tille petite ou moyenne à l’attitude dressée et au bec court et pointue. Il s’agit des vanneaux, des gravelots et des pluviers. Certaines espèces sont résidents en Afrique, d’autres originaires de différentes contrées effectuent des migrations qui les mènent sur le continent africain. L’ensemble réunit en Afrique une trentaine d’espèces dont 28 sont susceptibles d’être rencontrées dans notre zone d’étude (tableau V).
Tableau V. Espèces de Charadriidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Les vanneaux appartiennent tous au genre Vanellus (figure 60). Typiquement, ils possèdent des fanons faciaux rouges ou jaunes. Il existe 13 espèces dont les plus courantes sont certainement le vanneau éperonné, Vanellus spinosus (figure 61) et le vanneau armé, Vanellus armatus (figure 62), bariolés de blanc et noir, qui chassent les insectes au bord de l’eau.
Figure 60. Douze espèces de vanneaux que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Figure 61. Vanneau armé, Vanellus armatus, parc de Tarangire, Tanzanie (© IRD/D. Paugy).
On rencontre également une quinzaine de gravelots du genre Charadrius, et de pluviers du genre Pluvialis (figure 62). Il s’agit, pour certains, de migrateurs venus d’Europe ou d’Asie.
Ces oiseaux de petite taille ont le bec relativement court et nourrissent principalement d’insectes, de vers ou d’autres invertébrés, qu’ils prélèvent grâce à une technique dite « de course-et-pause », plutôt que de sonder régulièrement la vase comme le font certains autres groupes d’échassiers. Ils chassent donc à vue, plutôt qu’à l’odorat comme le font les échassiers à long bec tels que la bécassine.
Figure 62. Quatorze espèces de gravelots et de pluviers que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
18.2 Les Scolopacidés
Ces oiseaux aux longues pattes, fréquentent les plages et les bords des cours d’eau (tableau VI).
Tableau VI. Espèces de Scolopcidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Il s’agit, pour certaines des 28 espèces susceptibles d’être rencontrées, de migrateurs venus d’Europe à l’exemple des diverses espèces de chevaliers comme le combattant varié, Philomachus pugnax, qui se déplace parfois en troupes très denses, le chevalier guignette, Actitis hypoleucos, e chevalier culblanc, Tringa ochropus et le chevalier sylvain, T. glareola.
On rencontre également des barges, Limosa, des courlis, Numenius, des bécasseaux, Calidris, et des bécassines, Gallinago (figure 63).
Figure 63.Vingt-huit espèces de Scolopacidés que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
18.3 Les Glaréolidés
Dana la zone d’Afrique qui nous concerne, cette famille comprend trois genres et douze espèces (tableau VII).
Tableau VII. Espèces de Glaréolidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Les courvites ont de pattes longues, des ailes courtes et un bec long et pointu qui se courbe vers le bas (figure 64).
Figure 64. Les sept espèces de courvites que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Les glaréoles ont des pattes courtes, de très longues ailes pointues, un bec court et large et une queue profondément échancrée (figure 65).
Figure 65. Quatre des cinq espèces de glaréoles que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
18.4 Les Pluvianidés
Cette famille a récemment été séparée des Glaréolidés.
Le pluvian d’Égypte ou pluvian fluviatile, Pluvianus aegyptius, est très fréquent et court le long de l’eau (figure 66). C’est la seule espèce de cette famille. Ce limicole assez trapu, à pattes et bec courts, se reconnaît immédiatement à la combinaison gris-bleu, noir et blanc de son plumage. Cet oiseau possède un capuchon, un masque oculaire, un manteau et une bande pectorale noirs. Le reste de la tête est blanche, ainsi que le cou et le poitrail, la majorité des parties supérieures, gris-bleu. Les parties inférieures sont orange.
Figure 66. Pluvian d’Égypte ou pluvian fluviatile, Pluvianus aegyptius (© Luc Viatour).
Cette espèce est réputée pour pénétrer dans la bouche des crocodiles afin d'y prélever des restes de nourriture et des parasites. Légende ou réalité ? Difficile de trancher. Des comportements similaires ont en tous cas été observés chez d’autres espèces de pluviers.
18.5 Les Récurvirostridés
En Afrique, il existe deux espèces assez remarquables. Ce sont des oiseaux limicoles élancés et élégants, de 35 à 50 cm, aux pattes très longues et au plumage généralement pie. et un peu plus grandes déambulent en eau peu profonde : l’avocette élégante, Recurvirostra avosetta (figure 67), au bec assez long recourbé vers le haut et l’échasse blanche, Himantopus himantopus (figure 68), au bec droit, fin et de longueur moyenne.
Elles vivent dans les zones humides étendues et dégagées.
Figure 67. Avocette élégante, Recurvirostra avosetta, Marievale Nature Reserve, Gauteng, Afrique du Sud (© Derek Keats).
Figure 68. Échasse blanche, Himantopus himantopus, Marievale Nature Reserve, Gauteng, Afrique du Sud (© Derek Keats).
19. Les martins pêcheurs (Alcédinidés)
Parmi les Alcédinidés, il arrive que certain martins chasseurs (genre Halcyon) consomment consomme crabes, des crevettes ou des poissons lorsqu’ils fréquentent les mileiux aquatiques et que l’occasion se présente. Toutefois, leur habitat habituel est plutôt terrestre et ils ne sont pas inféodés aux milieux aquatiques.
A l’inverse, les martins pêcheurs ne vivent jamais très éloignés de l’eau. Ces oiseaux sont remarquables par le fait qu’ils sont capables de faire du vol sur place puis de plonger dans l’eau pour capturer les petits poissons. Dans la zone qui nous concerne, on peut rencontrer 9 espèces appartenant à plusieurs genres (tableau VIII)
Tableau VIII. Espèces de martins pêcheurs recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Parmi les neuf martins-pêcheurs que l’on rencontre dans la zone, deux sont de grande taille (longueur de 25 à 45 cm) et possèdent un plumage à dominante noir et blanc (figure 69). Le martin-pêcheur pie, Ceryle rudis, noir et blanc, fait son nid dans les berges. Le martin-pêcheur géant, Megaceryle torquata, est une espèce plus grande que la précédente, avec un plumage sombre tacheté de blanc et la gorge rousse.
Les autres espèces sont de taille beaucoup plus modeste mesurent en général 10 à 15 cm de long et de toute façon ne dépassent jamais 20 cm. Toutes ces espèces possèdent un plumage très coloré dont le dos est le plus souvent à dominante bleu.
Tous ces oiseaux sont dépendants des milieux aquatiques et leur régime alimentaire ets à base de petits poissons, d’amphibiens, de crustacés et d’insectes.
Figure 69. Les neuf espèces de martins-pêcheurs que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
20. Les Laridés
Plusieurs espèces migratrices de goélands et de mouettes peuvent être présentes temporairement dans les rivières et lacs d’Afrique continentale. Mais, seule la mouette à tête grise, Chroicocephalus cirrocephalus (figure 70), est une espèce locale qui a le bec et les pattes rouges.
Figure 70. Mouette à tête grise, Chroicocephalus cirrocephalus, Lac Naivasha, Kenya (© Nicolas Barcet).
La plupart des sternes fréquentent exclusivement les habitats côtiers. On les rencontre parfois lors de leur migration le long des façades océaniques voire à l'intérieur des terres, uniquement lorsque les conditions météorologiques sont exceptionnelles, notamment en cas de tempêtes. Cependant, cinq d’entre elles aiment séjourner dans les eaux douces intérieures de l’Afrique continentale (figure 71).
Figure 71. Les cinq espèces de sternes que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
On trouve également trois espèces de guifettes appartenant toutes au genre Chlidonias (figure 72). Les guifettes diffèrent peu morphologiquement des sternes. En revanche leur écologie est différente même si les deux groupes sont migrateurs. Les guifettes se nourrissent essentiellement d’insectes aquatiques, d’amphibiens, plus rarement de petits poissons. Les sternes s’alimentent essentiellement de poissons. Le nid des guifettes est formé d’un amoncellement de plantes aquatiques qui flotte sur l’eau des étangs ou des marais. De leur côté les sternes pondent à même le sol généralement à proximité de la mer.
Figure 72. Les trois espèces de guifettes que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Le bec en ciseaux d’Afrique, Rynchops flavoirostris, est endémique en Afrique subsaharienne (figure 73). C’est un oiseau curieux qui vole en laissant tremper la partie inférieure de son bec dans l’eau (figure 73). Lorsqu’il heurte un petit poisson, celui-ci est projeté dans son gosier.
Figure 73. Bec en ciseaux d’Afrique, Rynchops flavoirostris. Spécimen au repos sur la rive du Zambèze, Hurungwe, Mashonaland Occidental, Zimbabwe (© Robert Muckley) (à gauche) ; bec en ciseaux en action de pêche sur la rivière Chobe, Botswana (© Lip Kee) (à doite).
21. Les Hirundinidés
En Afrique, on est susceptible de rencontrer un peu plus de 40 espèces d’Hirundinidés, mais elles ne sont pas toutes inféodées aux milieux aquatiques. Dans la zone qui nous concerne on est néanmoins susceptible de rencontrer 10 espèces (tableau IX) qui se nourrissent en chassant les insectes en vol.
Tableau IX. Espèces d’Hirundinidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Le Pseudolangrayen d'Afrique, Pseudochelidon eurystomina, aussi appelé Pseudolangrayen de rivière, se reproduit le long du fleuve Congo et de son affluent, l'Oubangui. Il niche dans des terriers creusés dans les bancs de sable, et semble être assez commun au sein de son aire de répartition restreinte.
La petite hirondelle des rivages, Riparia riparia, se perche la nuit dans de grands dortoirs dans les roseaux (figure 74).
Figure 74. Quatre espèces d’hirondelles que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Dans la famille proche des Apodidés, il arrive que certaines espèces de martinets, comme le martinet noir, Apus apus, fréquent les milieux aquatiques pour se nourrir en vol d’insectes émergeants. Mais les Apodidés ne sont réellement des espèces liées aux milieux aquatiques.
22. Les bergeronnettes (Motacillidés)
Quelques espèces de bergeronnettes visitent l’Afrique régulièrement (figure 75). Certaines, sans être vraiment liée à l'eau, vivent souvent près d'elle. C’est le cas de la bergeronnette printanière, Motacilla flava, et de la bergeronnette grise, Motacilla alba. En revanche, la bergeronnette des ruisseaux, Motacilla cinerea, est très dépendante des milieux aquatiques, surtout de l’eau courante, mais on peut la rencontrer au bord de presque tous les types de milieux aquatiques.
Figure 75. Trois espèces de bergeronnettes que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
23. Les rousserolles (Acrocephalidés)
Parmi les douze rousserolles, les espèces du genre Acrocephalus (tableau X) ne vivent que dans les roselières inondées. Elles sont observées chassant au voisinage de l'eau qui joue visiblement un rôle important dans sa recherche de nourriture.
Tableau X. Espèces d’Acrocephalidés recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Certaines espèces, telle la rousserolle turdoïde, Acrocephalus arundinaceus (figure 76), ont besoin d'eau permanente. De toutes les rousserolles, c'est celle dont l'habitat est le plus restreint, à savoir exclusivement les phragmitaies. Elle occupe les roselières bordant les plans d'eau ou les cours d'eau. Contrairement à la rousserolle effarvatte, Acrocephalus scirpaceus (figure 76), qui peut occuper des phragmitaies sèches, la rousserolle turdoïde a besoin d’eau permanente. Malgré sa taille, elle se contente parfois de massifs de petite superficie, ainsi que de linéaires de roseaux le long de fossés, de drains ou de canaux, à la condition qu'ils soient en eau.
Figure 76. Huit espèces de rousserolles et phragmite du genre Acrocephalus que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
Les rousserolles sont tellement dépendantes des roselières que certaines espèces portent le nom commun de phragmite, du nom des roseaux qui les abritent. En Afrique, c’est le cas de la phragmite aquatique, Acrocephalus paludicola, et de la phragmite des joncs, Acrocephalus schoenobaenus (figure 76). Les rousserolles se nourrissent en priorité d'insectes.
Le chloropète aquatique, Calamonastides gracilirostris (figure 77), fréquente les marais, les marécages et les bordures des grands lacs. Il se trouve le plus souvent dans la partie sommitale des papyrus, et occasionnellement dans les roseaux. Cette espèce est menacée par la disparition de son habitat, due au drainage des zones marécageuses, à l'expansion démographique, à l'envahissement des marais par la jacinthe d'eau, Eichhornia crassipes, et par la destruction des papyrus. Des actions visant à protéger les marais à papyrus sont en cours au Rwanda et sur la partie kényane du lac Victoria.
Figure 77. Chloropète aquatique, Calamonastides gracilirostris, Ouganda (© Peter Berglin).
24. Les guêpiers (Meropidés)
Les guêpiers se trouvent plus particulièrement à proximité des rivières, des marécages, sur les berges des cours d'eau et le long des rives des lacs ayant des lits de roseaux ou de papyrus,. La plupart des espèces de guêpiers creusent des terriers dans les versants d'un fossé peu profond ou dans la berge d'une rivière. Ce sont dans ces terriers qu’ils nichent (figure 78). Dans la zone considérée, on dénombre 17 espèces de guêpiers parmi les 20 présentes dans toute l’Afrique (tableau XI, figure 79)
Figure 78. Terriers de guêpiers d’Europe, Merops apiaster, à gauche (© Frank Liebig) et de guêpiers de Perse, Merops persicus, à droite (© Yuriy75).
Tableau XI. Espèces de guêpiers, genre Merops, recensées en Afrique au nord de l’équateur.
Hormis pour les terriers dans lesquels ils nichent, les guêpiers sont en réalité peu dépendants des milieux aquatiques. Les guêpiers chassent les proies qui passent à proximité de l'endroit où ils sont postés. Dès qu'un insecte passe, ils s'élancent à sa poursuite, la happe, puis regagnent leur perchoir. Seul un tiers des sorties sont couronnées de succès. En chasse, ces oiseaux sont extrêmement actifs et peuvent effectuer plusieurs dizaines de sorties par heure. Il arrive fréquemment que plusieurs espèces de guêpiers cohabitent
Figure 79. Dix-sept espèces de guêpiers du gente Merops que l’on rencontre en Afrique au nord de l’équateur.
25. L’Afrique terre d’accueil des oiseaux migrateurs
Des millions d’oiseaux d’eau d’oiseaux d’eau qui se reproduisent Europe viennent hiverner en Afrique de l’Ouest. Très souvent dispersés pendant la période de nidification, ils se rassemblent au contraire en nombre très important dans les zones humides sub-sahariennes en saison sèche (d’octobre à mars), une période qui est alors particulièrement favorable pour les recenser. En Afrique de l’Ouest, trois grandes zones humides jouent un rôle important pour l’accueil des oiseaux migrateur européens : le bassin du lac Tchad, le delta central du Niger et le delta du Sénégal (figure 80).
Figure 80. Localisation des 3 principaux ensembles de zones humides d’Afrique occidentale et centrale
L’office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS, France) s’est impliqué dans de tels recensements depuis les années 1990 (ONCF, 2008).
Selon les résultats obtenus au début des années 2000, l’effectif régional des canards paléarctiques doit être un peu supérieur à 2 millions. La sarcelle d'été est partout la plus abondante, constituant en moyenne les trois-quarts de l'effectif total. Le canard pilet représente environ 20 % des canards paléarctiques. Son effectif régional est maintenant de l’ordre de 500 000 après une nette régression dans le bassin du lac Tchad. Le canard souchet, Anas clypeata (figure 41), n'est présent en nombre conséquent que dans le delta du Sénégal, où il n'y a pas de tendance d'évolution nette.
Parmi les autres canards paléarctiques, la sarcelle d’hiver, Anas crecca (figure 41), le canard siffleur, Anas penelope (figure 41), les fuligules milouin, Aythya ferina, et morillon, Aythya fuligula (figure 43), et plus rarement le tadorne de Belon, Tadorna tadorna (figure 42), ne sont présents que de façon marginale. Les récents comptages au Mali et au Tchad ont par contre fourni des effectifs inhabituellement élevés (jusqu’à 17 000) pour le fuligule nyroca, Aythya nyroca (figure 43).
Plus récemment, environ trois millions d’oiseaux d’eau ont été dénombrés en moyenne sur ces trois zones, en janvier 2006, 2007 et 2008. Les anatidés ont constitué la plus grande partie (70 %) des effectifs d’oiseaux d’eau recensés dans ces zones. Les canards paléarctiques ont représenté en moyenne 84 % des anatidés recensés. Avec 1,3 million d’individus dénombrés en moyenne, la sarcelle d’été, Anas querquedula (figure 41), d’été reste incontestablement, l’espèce de canard la plus abondante. Les effectifs d’anatidés paléarctiques dénombrés, comme la sarcelle d’été, Anas querquedula, et le canard pilet, Anas acuta (figure 41), sont sensiblement du même ordre de grandeur entre les années 1980 et 2000, à l’exception du fuligule nyroca, Aythya nyroca, dont les effectifs sont maintenant beaucoup plus élevés. Pendant cette période, la distribution des effectifs de certaines espèces d’anatidés sur les trois zones humides majeures a beaucoup varié, ce qui montre l’intérêt de les couvrir simultanément.
Pour les anatidés éthiopiens l’effectif total régional approchait 700 000 individus au début des années 2000. L'espèce la plus abondante était partout le dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata (figure 40), représentant environ 85 % du total. Les autres anatidés éthiopiens présents étant le dendrocygne fauve, Dendrocygna bicolor (figure 40), le canard à bosse ou canard casqué, Sarkidiornis melanotos (figure 39), l'oie armée de Gambie, Plectopterus gambensis (figure 45), (5 % pour chacune de ces 3 espèces), ainsi que l'ouette d'Égypte ou oie d’ Égypte, Alopochen aegyptiacus (figure 44) et l’anserelle naine ou sarcelle à oreillons, Nettapus auritus (figure 41), qui sont peu communes.
Fin des années 2000, les effectifs de canards afro-tropicaux s’élevaient à environ 340 000 individus en moyenne, le plus abondant étant toujours le dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata (figure 40) (83 % des effectifs de ce groupe). Les effectifs du dendrocygne fauve, Dendrocygna bicolor (figure 40), accusent une baisse très nette entre les deux périodes tandis que les effectifs de dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata, sont beaucoup plus élevés qu’auparavant.
Au cours des différentes opérations de recensement réalisées de 2006 à 2008 un peu moins de 500 000 limicoles ont été en moyenne recensés, dont 80 % environ étaient des combattants variés ou chevaliers combattants, Philomachus pugnax (figure 63). Les effectifs de barge à queue noire, Limosa limosa (figure 63), et d’échasse blanche, Himantopus himantopus (figure 68), représentent environ 11 et 6 % de ce total.
Évolution de quelques espèces d’oiseaux d’eau dans le delta du fleuve Sénégal. Période 1989-2010. (d’après Triplet et al., 2010, Faune sauvage n° 289)
Au cours des vingt années analysées le delta du fleuve Sénégal a subi des changements importants. Les conséquences des aménagements, notamment la mise en service du barrage de Diama (figure 81) à sa cote définitive, sont nombreuses. Ainsi, le développement d’une espèce végétale locale, le typha (figure 82), prive le delta de milliers d’hectares de terres inondables et cultivables, qui sont également des sites d’alimentation pour les anatidés et plus généralement l’ensemble des oiseaux d’eau. Malgré cela, les effectifs des différentes espèces montrent plus de fluctuations que de tendances à la baisse. Figure 81. Le delta du fleuve Sénégal. Figure 82. Typha domingensis (souvent improprement appelé Typha australis) est une plante commune en Afrique de l’Ouest. Contrairement à la croyance générale, car elle a été introduite il y a fort longtemps,, il s’agit d’une espèce exotique qui s’est s’établie dans des écosystèmes naturels ou semi-naturels et qui devient un facteur de changement du milieu et une menace pour la diversité biologique locale (© javier martin). Dans le delta du Sénégal, 17 espèces d’anatidés sont régulièrement dénombrées, pour un effectif total variant de 120 000 (1990) à 513 925 individus (2000). Ceux-ci sont principalement concentrés dans le Parc national des oiseaux du Djoudj (figure 81). Les effectifs au Parc national du Diawling (figure 81) tendent à augmenter, en raison d’une meilleure gestion du site depuis les années 1990. L’espèce la plus abondante est la sarcelle d’été, Anas querquedula, suivie du canard pilet, Anas acuta, puis du dendrocygne veuf, Dendrocygna viduata. À elles seules, ces trois espèces totalisent régulièrement plus de 90 % de l’effectif dénombré à la mi-janvier. Pour d’autres espèces comme les barges, la diminution des effectifs observée au Sénégal est compensée par l’augmentation de ces effectifs en Mauritanie. De manière globale, pour l’estuaire, les effectifs des différentes espèces il y a Des fluctuations parfois importantes d’une année à l’autre, mais pas de tendances à la baisse caractérisée. Dans les Parcs du Djoudj et du Diawling, une gestion de l’eau et de la végétation devrait permettre aux sites de fournir d’immenses ressources alimentaires pour de nombreuses espèces, notamment les anatidés. |
Les oiseaux ichtyophages sont-ils des concurrents des pêcheurs ?
Un certain nombre d’oiseaux ichtyophages sont accusés d’entrer en concurrence avec les pêcheurs. Ainsi, un pélican blanc consomme environ 1 à 1,2 kg de poisson frais par jour, soit environ 10 % du poids du corps. Dans les zones où les pélicans sont abondants, la consommation est donc loin d’être négligeable. Dans le lac Nakuru on avait calculé que la consommation pouvait atteindre entre 650 et 2 400 kg (poids frais) par hectare et par an, dont près de 90 % par le pélican blanc, Pelecanus onocrolatus (figure 3) (Vareschi & Jacobs, 1984). En Europe, le grand cormoran, Phalacrocorax carbo (figure 7) qui est protégé, est une espèce qui peut provoquer de grands dégâts dans les piscicultures. La situation est comparable en Afrique où le grand cormoran peut consommer jusqu’à 750 g de poissons par jour. D’autres espèces comme l’anhinga d’Afrique, Anhinga rufa, (figure 10) constituent également une source de prédation non négligeable en milieu naturel ou en pisciculture. Si on fait le total des oiseaux d’eau consommant du poisson, le prélèvement effectué sur les milieux aquatiques africains est probablement important. C’est pourquoi dans certaines régions les pêcheurs ont déclaré la guerre aux oiseaux.
Exemple du delta central du Niger au Mali Les pêcheurs bozos du delta central du Niger capturent des oiseaux d’eau qu’ils revendent sur les marchés. La « pêche » aux oiseaux d’eau peut prendre plusieurs formes : au fusil, pose de filets à poisson au-dessus des rizières ou des marais afin de capturer des canards ou des petits limicoles, pose d’hameçons appâtés avec un poissons sur les bancs de sable pour capturer des sternes, ou lignes dormantes non appâtées posées sur les bords des bras des fleuves dans un peu d’eau pour la capture des hérons et des cigognes, etc. La consommation des oiseaux d’eau fait partie des préoccupations des populations du Delta. Les oiseaux sont des ressources naturelles considérées par certaines communautés résidentes du delta intérieur au même titre que le poisson ou la viande de bétail. C’est une source de protéines (sécurité alimentaire) qui fournit en même temps une source de revenus monétaires quand ils sont vendus sur le marché. « La chasse se pratique au fusil de traite (de décembre à avril), au filet (février-mars), par la pose d’hameçons et au collet. La chasse au filet, la plus importante et pratiquée depuis très longtemps, est certainement la plus spectaculaire. Les chasseurs ont une activité itinérante et se déplacent en fonction de l’évolution des sites de gagnage des canards, liée aux crues du Niger. En fin d’après-midi ces chasseurs, qui connaissant parfaitement le milieu et les habitudes de l’avifaune, déploient un réseau de filets qui constituent autant de pièges pour les canards, sarcelles et limicoles qui profitent de la nuit pour venir se nourrir. Fixés sur des piquets en bois à environ un mètre du sol, ces filets à poche ne dépassent pas 80 cm de hauteur et 50 m de longueur, sont disposé en quinconce, laissant ainsi très peu de chances aux oiseaux de pouvoir les éviter. Les bourgoutières deviennent ainsi un vaste piège dans lequel les oiseaux d’eau, quittant les reposoirs par milliers, en vols souvent compacts, s’abattent avant de pouvoir se poser. Dès les premières lueurs du jour, avant que le soleil n’inonde les plaines marécageuses, les hommes reviennent sur le site de capture et inspectent les lignes de filets. Chaque oiseau capturé est alors égorgé, comme le veut la religion musulmane, avant d’être démaillé puis déposé dans un sac Les sarcelles d’été représentent environ 80-90 % des prises et le revenu monétaire le plus conséquent. Viennent ensuite diverses espèces dont le canard casqué, l’oie armée de Gambie (Plectropterus gambensis), le dendrocygne veuf (Dendrocygna viduata) et de nombreuses espèces de limicoles dont en particulier le chevalier combattant (Philomachus pugnax). Les pièges n’épargnent pas les autres oiseaux comme hérons et aigrettes, cigognes, spatules, cormorans, jacanas, râles et gallinules, parfois peu communs ou rares tels la talève sultane (Porphyrio porphyrio) ou la rhynchée peinte (Rostratula benghalensis). Enfin, des rapaces comme le busard cendré (Circus pygargus) ou le hibou des marais (Asio flammeus), des mouettes dont la mouette pygmée (Larus minutus), des goélands comme le goéland d’Audouin (Larus audouinii) et diverses espèces de chauves-souris viennent mourir dans les filets. La grue couronnée (Balearica pavonina) est également une espèce très recherchée, principalement vivante, et vendue au stade adulte ou comme oisillon. Le produit de la chasse est ensuite chargé sur des pirogues, ou parfois transporté à bicyclette ou en moto, à destination de Mopti qui constitue la plaque tournante de ce commerce. À ce niveau, des mareyeuses, habituellement marchandes de poissons, prennent en main le commerce des oiseaux pendant la période de capture. Une partie de ces derniers est vendue pour la consommation sur place mais la majorité des oiseaux est plumée, congelée puis expédiée à Bamako ou dans les villes proches des pays voisins. » (Extraits de : Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Asie – Mali. Niagate, 2008). |
En Afrique, la guerre des oiseaux d'eau migrateurs et des hommes En Afrique, la guerre des oiseaux d'eau migrateurs et des hommes. (© 2012 AFP).
Les oiseaux d'eau migrateurs pourraient rapidement déserter l’Afrique de l’Ouest si rien n'est fait pour freiner la disparition rapide de ses marais, estuaires, mangroves et autres zones humides indispensables à la biodiversité, grignotées peu à peu par l'homme. C'est autour de ce constat que se sont réunis du 14 au 18 mai 2012 quelque 300 experts et représentants des Etats membres de l'Accord international pour la conservation des oiseaux d'eau migrateurs (AEWA) à La Rochelle (ouest de la France), pour la cinquième conférence consacrée à ces espèces, sous l'égide de l'ONU. Selon Oystein Storkersen, 50% des plus grands voyageurs, ceux qui parcourent des dizaines de milliers de kilomètres par an, sont menacés. Après l'adoption par l'Europe, de haute lutte, de multiples directives pour les protéger, on s'aperçoit que les "millions" dépensés seront jetés par la fenêtre si rien n'est fait le long de leurs voies de migration, au-delà de l'UE, dit-il. En Afrique les oiseaux d'eau migrateurs meurent en raison de la destruction de leur habitat, des zones dites "humides" - marécages, mangroves, estuaires - où ils trouvent les aliments nécessaires à leurs longs déplacements. Les causes sont à rechercher dans l'explosion démographique du continent, comptant un milliard d'habitants et où 61% de la population vit encore sous le seuil de pauvreté. Il y a dans cette partie du monde, une "guerre pour l'habitat", et "seulement 10% de ces sites clef, indispensables au maintien de la biodiversité, sont protégés. "Il y a une compétition entre les hommes qui veulent exploiter ces milieux et les oiseaux", dit aussi le Sénégalais Abdoulaye Ndiaye, de l'ONG Wetlands international, dont la vocation est la préservation de ces habitats. « Les réserves sont grignotées mètre carré après mètre carré par les agriculteurs car c'est leur seul moyen de survie » explique encore Yves Gaugris. |
Les risques de dégâts d'oiseaux sur les rizières sahéliennes (d’après Tréca, 1989)
Les espèces d’oiseaux qui se nourrissent en groupes importants occasionnent des dommages sévères, bien visibles, sur certain champs, dommages pouvant même aller jusqu'à la perte totale de la récolte pour certains paysans. C'est le cas au Mali du tisserin « mange-mil », Quelea quelea, et de certains oiseaux aquatiques tels que la sarcelle d'été, Anas querquedula, le canard pilet, Anas acuta, voire de certains petits échassiers comme la barge à queue noire, Limosa limosa, ou le chevalier combattant, Philomachus pugnax. Dans la région de Mopti, Mali, les dommages causés par les oiseaux d'eau dans les cultures irriguées de riz flottant varient entre 1 et 15 % de la récolte, mais les dégâts peuvent parfois atteindre 100 % sur certaines parcelles. Les paysans connaissent le risque, mais ne peuvent prévoir l'emplacement des dégâts, bien que les risques soient plus forts au centre du casier, près d'une mare par exemple, que sur les bords. Les riziculteurs maliens considèrent que les oiseaux ont commis des dégâts lorsque ceux-ci dépassent un seuil de 4 à 5 % sur une parcelle et déposent alors une plainte auprès des encadreurs ou du chef de casier. Comme les surfaces peu attaquées ne font pas l'objet de plainte de la part des paysans, le pourcentage d'hectares perdus sur un casier rizicole comptabilisés est très proche du pourcentage réel des dégâts causés par les espèces mangeant en groupes et occasionnant des dégâts bien visibles comme les canards. En revanche, il est généralement très sous-estimé pour les espèces commettant des dégâts beaucoup plus diffus comme le chevalier combattant. Mais dans tous les cas, la perception des dégâts est plus aiguë si les récoltes sont mauvaises. C’est pour cette raison que les méthodes de lutte sont conçues contre les espèces ressenties comme principales déprédatrices, alors que les chevaliers combattants ne sont habituellement pas visés. La lutte ou la protection des champs doit apporter un gain de récolte assez important pour rentabiliser les efforts consentis pour soustraire aux oiseaux une partie de ce qu'ils détruisaient auparavant. Si la lutte provoque en même temps une diminution des rendements, ou si elle coûte plus cher que les gains supplémentaires attendus, elle n'aura pas atteint son but.
Risques de dégâts liés aux dates de culture Au Sénégal, les casiers rizicoles, proche du lac de Guiers, inondés par irrigation durant la saison sèche étaient presque les seules surfaces inondées de la région. Cette présence d’eau provoquait bien évidemment des regroupements d'oiseaux d'eau au moment des semis. Inversement, lorsque les semis sont effectués à l’arrivée de la crue les dégâts sont moindres, car à cette époque de nombreux oiseaux migrateurs sont partis vers l’Europe ou l’Asie et les oiseaux sédentaires sont beaucoup plus dispersés et ne sont pas concentrés aux abords des rizières. Il faut donc que les responsables des aménagements hydroagricoles soient conscients des risques que peuvent courir les cultures de contre-saison, au moment où le maximum d'oiseaux est présent dans la région et où les surfaces inondées naturelles sont réduites. Risques de dégâts liés aux variétés de riz En Afrique de l’Ouest, on cultive deux variétés de riz. Le riz dressé qui exige des travaux d'aménagement du sol importants et une bonne maîtrise de l'eau, mais qui produit des rendements élevés, et le riz flottant cultivé dans les zones peu ou pas aménagées. En ce qui concerne le riz dressé, seuls les gros Anatidés, canard armé ,Plectropterus gambensis, canard casqué, Sarkidiornis melanotos ou oie d'Egypte, Alopochen aegyptiaca, peuvent, en principe, atteindre les épis hors de portée d'espèces plus petites. En revanche, pour le riz flottant, les sarcelles d'été, Anas querquedula, surtout, mais aussi les canards pilets, Anas acuta, et parfois les dendrocygnes, Dendrocygna viduata et D. bicolor, peuvent commettre des dégâts importants, estimés voici une quarantaine d'années à 10 à 20 % .de la production Risques de dégâts liés à la localisation géographique des rizières On s’est aperçu que les terrains de gagnage où les canards vont se nourrir doivent être situés dans un rayon de 20 à 30 km au maximum des lieux de repos diurnes ou remises. Les rizières situées à une distance plus grande d'une remise ne risquent pas, a priori, de dégâts d'oiseaux d'eau, sauf en cas de déplacement de la remise ou de conditions climatiques très défavorables. En pratique, donc, l'étude de la répartition spatiale des canards en fonction de la crue doit permettre de définir des zones à risques où les casiers qui y seraient aménagés pourraient, éventuellement subir des dommages d'oiseaux d'eau, et d'autres zones où ces risques seront quasi nuls.
Il n'est pas possible, dans le cas des oiseaux d'eau et surtout des oiseaux migrateurs, d'envisager des actions de destruction à grande échelle, et c'est là l'originalité de la lutte contre les oiseaux d'eau par rapport aux autres déprédateurs des cultures comme les manges-mil, les insectes ou les rongeurs. Cependant, localement, les pêcheurs du Delta Central au Mali placent des filets à poisson au-dessus des rizières et capturent ainsi plusieurs milliers d'oiseaux d'eau qui sont ensuite revendus sur les marchés. Les populations locales profitent alors de protéines animales qui remplacent en partie le riz perdu. |
26. Les migrations des oiseaux
Les migrations des oiseaux font partie des cycles de la nature. En Égypte, ils annonçaient le retour de la crue. Globalement, la migration est une stratégie visant à faire usage des variations saisonnières de conditions climatiques et de la disponibilité des ressources naturelles.
Une des plus anciennes représentations d'oiseaux migrateurs est la peinture dite des « oies de Meidum » dans le Mastaba de la tombe de Nefermaat en Égypte. Sur les trois espèces migratrices d’oies représentées, la bernache à cou roux, Branta ruficollis, l’oie des moissons, Anser fabalis, et l’oie rieuse, Anser albifrons, les deux premières ne se retrouvent plus en Égypte de nos jours et la troisième n’y fait que de très rares apparition, alors qu’elles fréquentaient régulièrement les champs de la vallée du Nil il y a 4500 ans.
26.1 La migration paléarctique-africaine
Elle est essentiellement dépendante du froid de l'hiver dans le nord. La migration se fait selon l’axe nord-sud. Inversement, de nombreux migrateurs paléarctique-africains quittent l’Afrique qui devient inhospitalière au cours de longues périodes de sécheresse où la compétition pour la nourriture est élevée.
26.2 La migration intra-africaine
Elle correspond aux mouvements des oiseaux au sein de l'Afrique selon les déclencheurs locaux et les conditions météorologiques continentales, en particulier la pluviométrie.
Les oiseaux migrateurs ont tendance à utiliser les mêmes routes chaque année. On a appris, grâce notamment aux techniques de bagage, que beaucoup des oiseaux d’eau utilise les mêmes itinéraires et lieux de repos, année après année.
Les connaissances actuelles ne permettent pas d'apporter une réponse claire à l’interrogation : pourquoi les oiseaux migrent-ils ? Les routes migratoires ont en effet changé au cours des temps géologiques. L'hypothèse la plus probable est liée à la climatologie. Lors des périodes de froid dans l’hémisphère nord, les oiseaux poussés par la faim se seraient déplacés progressivement plus au sud et auraient ainsi modifié leur aire de répartition. Le réchauffement du climat aurait, par la suite, entraîné une recolonisation des territoires perdus. Les schémas de migration actuels ont probablement émergé lors de la dernière période postglaciaire, il y a environ 10.000 ans.
Durant la période de «Sahara vert» (extrait de Paugy et al., 2011) entre 7 000 et 3 000 ans avant J.C., la longueur des routes migratoires et le nombre d'oiseaux utilisant cette région ont dû être profondément modifiés. Actuellement, le Sahara est un sérieux obstacle pour beaucoup d’oiseaux migrateurs, mais cela n’a pas toujours été le cas et, aujourd’hui, certains oiseaux choisissent de survoler cet obstacle périlleux
26.3 La migration trans-équatoriale
Certains oiseaux d'eau traversent l’équateur à chaque changement de saison. C’est le cas de la Cigogne d'Abdim, Ciconia abdimii, qui nidifie dans la zone sahélienne d'Afrique de l'Ouest au cours de la saison des pluies, avant de migrer vers l'Afrique de l'Est, notamment le nord-ouest de la Tanzanie. Elle y arrive en novembre au début des pluies, avant de se déplacer vers le nord, par la vallée du Rift , puis de retourner en Afrique de l'Ouest, à temps pour le début de la saison des pluies.
Un autre oiseau d’Afrique, le bec ouvert africain, Anastomus lamelligerus, se reproduit principalement en Afrique australe et orientale, souvent en fin de saison des pluies et en saison sèche, après quoi il se déplace vers le nord de la zone sahélienne et en Afrique de l'Ouest, où il est présent principalement en saison sèche. Alors que la cigogne d’Abdim mange les larves et d'autres proies qui apparaissent quand les pluies commencent (Figure 1.10), le Bec-ouvert africain est un spécialiste des mollusques qui seront disponibles plus tard quand les zones inondées se découvrent.
27. Protection et initiatives de conservation des oiseaux migrateurs
Les oiseaux migrateurs sont soumis à de nombreuses menaces, dont celles qui pèsent sur l’habitat, et celles qui tiennent à la chasse et aux prélèvements.
Pour lutter contre ces menaces, il existe de nombreuses initiatives de conservation le long des voies de migration. Elles diffèrent par le nombre d'espèces inscrites et la taille de la zone géographique couverte, ainsi que dans leurs formes juridiques et administratives. Les initiatives vont des conventions internationales aux projets sur une voie de migration, certaines de ces initiatives sont énoncées ci-dessous
Un des premiers traités internationaux de protection des oiseaux d’eau fût la « Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau », dite Convention Ramsar.
Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau.
La convention a été élaborée et adoptée par les nations participantes lors d'une réunion à Ramsar, Iran le 2 février 1971. Elle est entrée en vigueur le 21 décembre 1975. Elle engage les signataires à :
La liste des zones humides d'importance internationale contient, début 2009, 1828 sites (dont 931 en Europe, soit 51 % du total en nombre et 14 % de la surface totale), représentant une surface de plus de 1,6 million de kilomètres carrés, alors qu'en 2000, il n'y en avait que 1021. Le pays comprenant le plus de sites est le Royaume-Uni avec 169, tandis que le pays ayant la plus grande surface de zones humides listées est le Canada avec plus de 130 000 km2, dont le Golfe de la Reine-Maud avec 62 800 km2. 168 pays (sur 192 dans le monde) ont actuellement signé cette convention, contre 119 en 2000. Ils étaient 18 en 1971. Le dernier pays à avoir signé la convention est le Soudan du Sud, le 10 juin 2013. 2 122 sites ont été désignés pour une superficie totale de 205 366 160 hectares. Les pays signataires se rencontrent tous les trois ans lors d'une conférence, la première ayant eu lieu à Cagliari (Italie) en 1980 et la dernière conférence des parties ayant eu lieu en 2009 en Corée. Les pays signataires n'ont néanmoins pas doté la convention de moyens propres et la dernière conférence des parties n'a pas trouvé de consensus pour l'intégrer au sein de l'ONU (pour des raisons d'économies financières). Des avenants à la convention initiale ont été adoptés à Paris en 1982 et à Regina en 1987. Les parties se réunissent tous les 3 ans et votent des résolutions et recommandations et, chaque année, un Comité permanent composé de représentants des 6 « régions Ramsar » se réunit pour gérer la convention et prendre les décisions courantes. Ce Comité et la Convention s'appuient sur un secrétariat, un organe subsidiaire jouant le rôle d'un conseil scientifique (« Groupe d'évaluation scientifique et technique » ou GEST) et un autre en charge du programme de communication, d'éducation, de sensibilisation et de participation du public (CESP) et sur des organisations internationales ONG partenaires. Chaque année, en commémoration de la signature de la convention, les Journées mondiales des zones humides sont organisées par différentes associations, collectivités ou organismes d'état pour sensibiliser le grand public à ces milieux. Le siège de cette convention se trouve à Gland (Suisse), avec celui de l'Union mondiale pour la nature (UICN). |
L’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (PNUE/AEWA)
L’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA) est un traité international indépendant développé sous les auspices du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et de la convention de Bonn conclue le 16 juin 1995 à la Haye. Il s'agit du plus important accord lié à la Convention de Bonn, tant pour sa couverture géographique que pour le nombre d’espèces, et l’accord sur la plus grande voie de migration du monde. L'AEWA est entré en vigueur en Novembre 1999, son secrétariat est basé aux bureaux de l'UNEP/CMS, à Bonn en Allemagne. Un Plan d'Action définissant les activités de la Convention a été mis en place. L’AEWA concerne 255 espèces d’oiseaux d'eau migrateurs (et d’oiseaux de mer) qui dépendent écologiquement des zones humides pour au moins une partie de leur cycle annuel: de nombreuses espèces de Pélicans, de Cigognes, de Flamants roses, de Canards, de limicoles, de Sternes, de Goélands et d’Oies. L'AEWA couvre 118 Etats en Afrique, en Europe, et même certaines régions du Canada, de l'Asie centrale et du Moyen-Orient. La zone géographique s'étend du Nord du Canada et de la Fédération de Russie à la pointe sud de l'Afrique (figure 83). Les Parties de l'Accord sont appelées à s'engager pour une grande variété d'actions qui sont décrites dans un plan d'action exhaustif (comme celui de 2003-2005). Ce plan détaillé aborde des questions clés telles que la conservation des espèces et des habitats, la gestion des activités humaines, la recherche et la surveillance, l'éducation. Figure 83. Carte des 119 pays situés en Europe, une partie de l'Asie, du Canada, du Moyen-Orient et de l'Afrique où est appliquée le traité international de l’AEWA. |